Cadeau des éditions Seuil

J’avais déjà bien aimé Ciel d’acier, je ne savais pas grand chose avant cette lecture sur la construction des buildings de New York. Je n’ai donc pas hésité à accepter de lire et commenter ce nouveau roman de Michel Moutot car je savais que l’auteur saurait me faire partager ses connaissances techniques sur les grands chantiers qui ont transformé les paysages aux États Unis.

Ce n’est pas un roman linéaire chaque chapitre commence par une date et un lieu, je me suis habituée petit à petit à cette lecture éclatée en comprenant assez vite qu’un moment tout allait converger en un seul point : la fin de la construction de la route qui relie San Francisco à Los Angeles traversant des contrées splendides mais si peu accessibles.

 

Les personnages tournent tous autour de cette route pour laquelle il a fallu arraser des montagnes, creuser dans la roche construire des ponts en employant une main d’œuvre si peu considérée. Il faut dire que ce grand pays était en crise et que le chômage était tel que personne n’était très regardant ni les employeurs ni les ouvriers qui étaient réduits à la mendicité. Nous allons suivre le destin de Will Tremblay un enfant choyé par ses parents adoptifs et qui deviendra ingénieur de travaux publics. Il commencera sa carrière par la construction d’un barrage à Boulder. Cette construction causa la mort de nombreux ouvriers en particulier ceux qui creusaient des tunnels de dérivation car la compagnie ne voulait pas perdre de temps pour faire des aérations dans les tunnels.

Will préfèrera démissionner plutôt que couvrir ces crimes au nom du profit. Son père qui avait été totalement ruiné par la crise de 29 l’a suivi en Californie mais hélas, il gagnera sa vie comme croupier et refusera de faire des combines malhonnêtes, il le paiera de sa vie. Will se retrouvera donc sur la construction de la « Route ONE ». Tous ces grands chantiers nous permettent de voir l’envers du décor de ses superbes réalisations techniques. La misère qui a jeté sur les routes des milliers d’Américains ruinés est très bien décrite et c’est parfois à peine supportable.

Nous suivrons aussi une famille de Mormons qui fuit les lois qui empêchent la polygamie et qui a créé un ranch dans cet endroit qu’elle croyait inaccessible. Nous allons partager leur vie et connaître aussi des Indiens qui eux ont vraiment tout perdu : leur pays et surtout ne peuvent plus vivre comme ils le faisaient avant en harmonie avec la nature. Lorsque la route avance nous sommes avec le descendant du Mormon qui a créé ce ranch et celui-ci met toute son énergie à empêcher la construction de la route. Au début nous pensons qu’il veut simplement protéger les siens du regard des autres mais très vite nous comprenons qu’il s’agit aussi de protéger sa fortune. Nous découvrons alors les mœurs des Mormons et c’est loin d’être la vie paradisiaque présentée dans une des séries américaines, les femmes sont malheureuses et soumises et les enfants sont endoctrinés dès leur plus jeune âge .

Le roman permet aussi de voir à quel point la société de cette époque était corrompue, comment de la prison les chefs de la mafia pouvaient se faire de l’argent en volant les fournitures des gros chantiers des travaux publics, nous passons même un petit moment avec Al Capone dans la prison d’Alcatraz.

Un roman foisonnant et je devais sans cesse me reporter à la tête de chapitre pour m’y retrouver mais c’est aussi un roman fort bien documenté qui permet de connaître un peu mieux les États-Unis sous un regard critique mais objectif.

 

Citations

Paysage de Californie en 1848.

Arrivé au sommet d’un petit mont, il embrasse du regard une côte découpée, des rocher sombre où s’accrochent des cyprès torturés par les vents du large, des successions d’îlots et de récifs sur lesquels se brisent, dans des gerbes d’écume, les vagues du Pacifique. Les rayons du soleil, à travers les milliards de particules dorées, nimbe le paysage d’une lumière irréelle. Plus loin, ils devine des alignements de falaises, succession de montagnes couvertes de forêts de pins et de séquoias. Par endroits, là où s’engouffre la furie des tempêtes océane, des prairies sont piquetées d’arbustes nains, comme plaqués au sol par la main d’un géant.

1848 les rares Indiens survivants.

Wild Bear -« Ours sauvage »- comprend l’anglais, le parle mal mais assez pour raconter que ses ancêtres ont, pendant la colonisation espagnole, échapper à l’enrôlement et au travail forcé dans la mission san Carlos de Carmel en se cachant dans les montagnes. Des générations de fugitifs ont survécu dans les replis de la sierra en été, au creux de criques secrètes sur la côte en hiver, refusant le contact avec ces prêtres et ces colons espagnols, puis mexicains, qui avaient l’amour de leur Dieu a la bouche et l’épée à la main. Pauvres, affamés, craintifs, misérables mais libres, heureux parfois, à l’abri de ces démons et de leurs grandes croix, gibets, prêches, interdits, fouets et maladies étranges qui ont qui ont presque rayé les indiens Esselen du monde des vivants.

Une adoption réussie .

 « Rien de trop beau pour mon Willy. Diplômé, mon fils. Et avec avec les honneurs. En route pour l’université, des études d’ingénieur. Mon dieu, si sa mère pouvait le voir, si Helen était encore parmi nous… Comme elle serait fière de son petit orphelin… Ce garçonnet au regard de chiot inquiet que nous avons découvert dans le bureau du directeur de St Cloud’s, que nous avons adopté, nourri, protégé, aimé, à nous en faire exploser le cœur. Pourquoi n’est-elle pas à mes côtés pour le voir, grand adolescent musclé, presque un jeune homme, sourire de miel, jambes d’athlète et bras de statues grecque ? Quelle injustice ! »
Will n’évoque pas souvent son souvenir. Son père s’en étonnait un peu, au début. Mais quatre ans ont passé, c’est ainsi qu’il calme sa peine. Il apprend à vivre sans elle, de tourne vers l’avenir, et c’est bien. Tous deux regardent parfois, au moment du dîner, la photo encadrée sur le mur de la cuisine, où ils sont tous les trois sur la plage, en tenue de bains. Son père pose la main sur son épaule. Il sourit, ne trouve pas les mots. Lui non plus. Elle est là, entre. Pas besoin de parler.

Les Indiens en 1850.

 Ils n’ont aucun document d’identité, aucune existence légale, descendants des premiers habitants de ces montagnes Transformée par l’arrivée des conquistadors en clandestins, fuyards perpétuels, proscrits sur les terres de leurs ancêtres. S’ils connaissent chaque sentier, chaque ruisseau et chaque séquoia géant, qu’ils traitent et honorent comme des divinités, s’ils prédisent l’arrivée d’une tempête ou quand se lèvera le brouillard de mer, ils n’ont aucun droit face à l’administration naissante de l’État de Californie. 

Traduit de l’anglais (États-Unis) par Sarah Gurcel

 Je dois la lecture de ce livre à Philippe Meyer (avec un « e » à Philippe) il anime une émission que j’écoute tous les dimanches matin, « L’esprit public » , elle se termine par une séquence que j’attends avec impatience celle des « brèves » où chaque participant recommande une lecture, un spectacle, un CD. Un jour Philippe Meyer a recommandé ce roman et ses mots ont su me convaincre. Je profite de billet pour dire que la direction de France-Culture, après avoir censuré Jean-Louis Bourlanges, évince Philippe Meyer en septembre. Je ne sais pas si des lettres de protestations suffiront à faire revenir cette curieuse direction sur cette décision, mais j’engage tous ceux et toutes celles qui ont apprécié « L’esprit public » à écrire à la direction de France-Culture.
J’ai rarement lu un roman aussi éprouvant. J’ai plus d’une fois pensé à Jérôme qui, souvent s’enthousiasme pour des écritures sèches décrivant les horreurs les plus absolues. C’est exactement ce que j’ai ressenti lors de cette lecture. Les massacres de la famille du colonel McCullough par les Comanches, celui de la famille Garcia par les rangers américains sont à peu près insoutenables parce qu’il n’y a aucun pathos mais une précision qui donne envie de vomir. Ce grand pays est construit sur des monceaux de cadavres. Je suis restée une quinzaine de jours avec les trois personnages qui, à des époques différentes, finissent par décrire exactement d’où viennent les États-Unis. L’ancêtre Elie McCullogh est né en 1836, il vivra cent ans et établira la fortune de la famille. Son passage chez les Comanches fera de lui un redoutable prédateur mais aussi un homme d’une intelligence remarquable. Son fils Peter né en 1870 ne se remettra jamais de l’assassinat par son père et ses amis de la famille Garcia des Mexicains qui avaient 300 années de présence à côté du ranch de son père, eux-mêmes avait, évidemment auparavant, chassés les Indiens. Enfin, la petite fille de Peter Jeanne-Anne McCullogh née en 1926, enrichie par le pétrole et qui sera la dernière voix des McCullogh.
La vie chez les Comanches est d’une dureté incroyable et n’a rien à voir avec les visions romantiques que l’on s’en fait actuellement. Mais ce qui est vrai, c’est que leur mode de vie respectait la nature. La civilisation nord-américaine est bien la plus grande destructrice d’un cadre naturel à l’équilibre très fragile. Entre les vaches ou le pétrole on se demande ce qui a été le pire pour le Texas. Lire ce roman c’est avoir en main toutes les clés pour comprendre la nation américaine. Tous les thèmes qui hantent notre actualité sont posés : la guerre, la pollution des sols, le racisme, le vol des terres par les colons, la place des femmes.. mais au delà de cela par bien des égards c’est de l’humanité qu’il s’agit en lisant ce roman je pensais au livre de Yuval Noah HARARI. C’est une illustration parfaite de ce que l’homme cueilleur chasseur était plus adapté à son environnement que l’agriculteur.

Citations

PREMIÈRE PHRASE

On a prophétisé que je vivrai jusqu’à cent ans et maintenant que je suis parvenu à cet âge je ne vois pas de raisons d’en douter.

Humour

On sait bien qu’Alexandre le Grand lors de sa dernière nuit parmi les vivants, a quitté son palais en rampant pour tenter de se noyer dans l’Euphrate, sachant quand l’absence de corps son peuple le croirait monter au ciel parmi les dieux. Sa femme l’a rattrapé sur la berge ; elle l’a ramené de force chez lui où il s’est éteint en mortel. Et après on me demande pourquoi je ne me suis jamais remarié.

La dure loi du Texas

 » C’est comme ça que les Garcia ont eu leur terre, en se débarrassant des Indiens et c’est comme ça qu’il fallait qu’on les prenne. Et c’est comme ça qu’un jour quelqu’un nous les prendra. Ce que je t’engage à ne pas oublier ».
Au final mon père n’est pas pire que nos voisins : eux sont simplement plus modernes dans leur façon de penser. Ils ont besoin d’une justification raciale à leurs vols et leurs meurtres. Et mon frère Phinéas est bien le plus avancé d’entre eux : il n’a rien contre les Mexicains ou contre toute autre race , mais c’est une question économique. La science plutôt que l’émotion. On doit soutenir les forts et laisser périr les faibles. Ce qu’aucun d’eux ne voit, ou ne veut voir, c’est qu’on a le choix.

les différences de comportement selon les origines

L’Allemand de base n’était pas allergique au travail : il suffisait de voir leurs propriétés pour s’en convaincre. Si, en longeant un champ, vous remarquez que la terre était plane et les sillons droits, c’est qu’il appartenait à un Allemand. S’il était plein de pierres et qu’on aurait dit les sillons tracés par un Indien aveugle, ou si on était en décembre et que le coton n’était toujours pas cueilli, alors vous saviez que c’était le domaine d’un blanc du coin qui avait dérivé jusqu’ici depuis le Tennessee dans l’espoir que, par quelque sorcellerie, Dame Nature, dans sa largesse lui pondrait un esclave.

Le charme des noms Comanches

Bien des noms Comanches étaient trop vulgaires pour être consignés par écrit, aussi, quand la situation l’exigeait, les Bancs les modifiaient. Le chef qui emmena le fameux raid contre Luneville en 1840 (au cours duquel cinq cents guerriers pillèrent un entrepôt de vêtements raffinés et s’enfuirent en haut de forme, robe de mariée et chemise de soie) s’appelait Po-cha-na-quar-hip ce qui signifiait Bite-Qui-Reste-Toujours-Dure. Mais pas plus cette version que la traduction plus délicate d’Érection- Permanente ne pouvait paraître dans les journaux,aussi décida-t-on de l’appeler Bosse-de-Bison.

Après 15 pages inoubliables pour expliquer l’utilisation de la moindre partie du corps du bison pour les Comanches, voici la dernière phrase

 On laissait toujours le cœur la même où le bison était tombé : lorsque l’herbe pousserait entre les côtes restantes, le Créateur verrait que son peuple ne prenait que ce dont il avait besoin et veillerait à ce que les troupeaux se renouvellent et reviennent encore et encore
 

Les richesses dues au pétrole

La provision pour reconstitution des gisements et quelque chose de totalement différent. Chaque année, un puits qui produit du pétrole te fait gagner de l’argent tout en te permettant de réduire des impôts.
– Tu fais un bénéfice mais tu appelles ça une perte ».
Elle voyait bien qu’il était satisfait.
– » Ça paraît malhonnête.
– » Au contraire. C’est la loi aux États-Unis.
-Quand même.
– Quand même rien du tout. Cette loi a une bonne raison d’être. Il y a des gens pour élever du bétail, même à perte : pas besoin de mesures incitatives. Alors que le pétrole, lui, coûte cher à trouver, et encore plus cher à extraire. C’est une entreprise infiniment plus risquée. Alors si le gouvernement veut que nous trouvions du pétrole, il doit nous encourager.

Le fils (d’où le titre)

Être un homme signifiait n’être tenu par aucune règle. Vous pouviez dire une chose à l’église, son contraire au bar, et d’une certaine façon dire vrai dans les deux cas. Vous pouviez être un bon mari, un bon père, un bon chrétien, et coucher avec toutes les secrétaires, les serveuses, les prostituées qui vous chantaient.

La guerre de Sécession

À la fin de l’été, la plupart des Texans étaient persuadés que si l’esclavage été aboli, le sud tout entier s’africaniserait, que les honnêtes femmes seraient toutes en danger et que le mot d’ordre serait au grand mélange. Et puis, dans le même souffle, ils vous disaient que la guerre n’avait rien à voir avec l’esclavage, que ce qui était en jeu, c’était la dignité humaine, la souveraineté, la Liberté elle-même, les droits des états : c’était une guerre de légitime défense contre les ingérences de Washington. Peu importait que Washington ait protégé le Texas des visées mexicaines. Peu importait qui le protège encore de la menace indienne.

La Californie

Une fois la sécession votée, l’ État du Texas se vida……
Des tas de sécessionnistes partirent aussi. Sur les nombreux train qui s’en allaient vers l’ouest, loin des combats, on voyait souvent flotter haut et fier le drapeau de la Confédération. Ces gens-là était bien favorables à la guerre, tant qu’ils n’avaient pas à la faire. J’ai toujours pensé que ça expliquait ce que la Californie est devenue.

Principe si étrange et malheureusement pas si faux !

Mon père a raison. Les hommes sont faits pour être dirigés. Les pauvres préfèrent moralement, sinon physiquement, se rallier aux riches et aux puissants. Ils s’autorisent rarement à voir que leur pauvreté et la fortune de leurs voisins sont inextricablement liés car cela nécessiterait qu’ils passent à l’action, or il leur est plus facile de ne voir que ce qui les rend supérieurs à leurs autres voisins simplement plus pauvres qu’eux. 

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Traduit de l’américain par Pierre Furlan. Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard. Thème : le Far-West.

5
Une nuit inoubliable passée en partie avec ce livre qui a eu un coup de cœur à notre club. Quatre lectrices ont défendu avec une telle passion ce roman que j’ai succombé à mon tour. Quel chef d’œuvre ! Cela fait longtemps que je n’ai pas éprouvé un plaisir aussi parfait. Je dis souvent que le suspens me dérange pour apprécier une histoire, je rajouterai maintenant, sauf quand l’auteur est beaucoup plus intelligent que moi. Car il s’agit bien de cela un combat d’intelligences, entre celle des personnages, celle des lecteurs mais par dessus tout celle de l’écrivain. Et le plus fort de tout, c’est qu’au fond de lui Thomas Savage ne croit qu’à la gentillesse et à l’humanité, il se méfie de l’intelligence surtout quand elle est destructrice.

Ce livre d’hommes sur fond de western, est un hymne à la douceur des gentils dans un monde si brutal que l’on n’imagine pas que la moindre fleur puisse y déployer ses pétales. Pourtant Rose et Georges que son frère Phil, appelle Gras-Double surmonteront ensemble les noirceurs de la violence. Ce livre ne se raconte pas, il faut faire confiance et se laisser porter vers un Far West qui n’a rien de romantique mais qui est si humain qu’on est beaucoup plus proche, sans doute, de ce qui s’est vraiment passé que dans n’importe quel film de John Wayne.

On a aussi, et avec quelle maîtrise, les décors natu­rels, les odeurs , les scènes d’animaux, les chevau­chées, les saloons, les personnes fortes, les humi­liés, mais rien de tout cela ne raconte complè­te­ment cette histoire, c’est un décor dans lequel se joue un drame si prenant qu’on ne peut le lire que d’une traite. Mais c’est surtout un livre qui permet de comprendre que sans l’intelligence du cœur, l’homme n’est qu’un misérable « tas de petits secrets » en contredisant Malraux et son admiration pour les grands hommes si courageux soient-ils, comme l’est Phil qui a gâché sa vie et celle des siens pour un secret que seul la lecture du roman pourra vous dévoiler.

Citations

Conseil d’un père à son fils

– Je te dirai, Peter, de ne jamais te soucier de ce que racontent les gens. Les gens ne peuvent pas savoir ce qu’il y a dans le cœur des autres.
– Je ne me soucierai jamais de ce que racontent les gens.
– Peter, s’il te plait, ne le dis pas tout à fait comme ça. La plupart des gens qui ne s’en soucient pas, oui, la plupart d’entre eux deviennent durs, insensibles. Il faut que tu sois bienveillant. Je crois que l’homme que tu es capable de devenir pourrait faire beaucoup de mal aux autres, parce que tu es si fort. Est-ce que tu comprends ce qu’est la bienveillance, Peter ?
– Je n’en suis pas sûr, père.
– Eh bien, être bienveillant, c’est essayer d’ôter les obstacles sur le chemin de ceux qui t’aiment ou qui ont besoin de toi.
– Ça je le comprends.

L’ivrogne du saloon

Un soûlot, dès qu’il vous met le grappin dessus, il vous bassine avec des âneries. Il fait semblant d’être ce qu’il n’est pas, il joue un personnage trop grand pour lui. Et vous aurez beau l’insulter ou lui balancer n’importe quoi pour le remettre à sa place, il continuera à jacasser.

Définition d’un aristocrate

Phil avait un esprit pénétrant, curieux – un esprit qu’il enrichissait et qui déroutait maquignons et voyageurs de commmerce. Car, pour ces gens, un homme qui s’habillait comme Phil, qui parlait comme Phil, qui avait les cheveux et les mains de Phil, devait être simplet et illettré. Or, ses habitudes et son aspect obligeaient ces étrangers à modifier leur conception de ce qu’est un aristocrate, à savoir quelqu’un qui peut se permettre d’être lui-même.

L’amour maternel

Je l’aime mais je ne sais pas comment l’aimer. Je voudrais que mon amour l’aide pour quelque chose mais on dirait qu’il n’a besoin de rien.

20160131_130735_021Traduit de l’américain par Béatrice Vierne. Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard dans le thème découverte de l’Ouest américain.

J’adore la dédicace de ce livre :

Le livre que voici est dédié à Marguerite Cole Moomaw qui combattit à mes côtés dans la guerre des Gaules. Épaule contre épaule, nous avons lutté contre Jules César et les légions romaines à l’école de Whitefish, tout au long de l’année scolaire 1919-1920.

4Dans une préface très agréable à lire, car elle rend très présente Dorothy Johnson, Michel Le Bris m’a appris que cette écrivaine était, non seulement une journaliste respectée, une professeure admirée mais aussi l’auteure des nouvelles dont ont été tirés de très bons Western : « la colline des potences  » et « L’homme qui tua Liberty Valance ».

À travers de courts chapitres, l’auteure égrène ses souvenirs et peu à peu tous les aspects de la vie de ce village s’animent. Les temps sont rudes, et les distractions assez rares, mais cela n’empêche pas un vrai bonheur de transparaître à travers différentes anecdotes. Les enfants sont livrés à eux mêmes et trouvent dans la nature de quoi satisfaire leurs envies d’aventures.

Pour gagner quelques subsides, ils mèneront une chasse acharnée aux boites de conserves qui serviront à reboucher les trous dans les routes défoncées du village. Ils suivent avec passion le policier qui est aussi l’homme qui manie la dynamite pour enlever les souches. Ils apprennent à nager tout seuls dans des lacs superbes mais glacés. Ils courent le long des voies ferrées. Ils chassent et mangent le produit de leur chasse. Ils se méfient des étrangers surtout quand ils parlent mal l’anglais (comme ces Français qui ne savent pas prononcer le nom de leur capitale qu’ils appellent « Paree »). Cette auteure sait mettre de l’humour dans ses récits, son dialogue avec les poules est inoubliable, ainsi que ses différentes expéditions de camping. C’est un livre revigorant d’une époque révolue qu’elle sait ne pas trop regretter mais qui lui a forgé un satané caractère. Celui dont elle a eu besoin pour se battre dans la vie.

Citations

L’argent de poche

Il n’y avait aucune source fiable de revenus pour le jeunesse, voilà tout. Les commissions (les gens n’avaient pas besoin de téléphone – ils avaient des gosses) se faisaient gratis pour la famille et moyennement finances, à l’extrême rigueur pour les voisins, – à raison de cinq cents s’ils étaient économes et dix s’ils étaient prodigues.

Les distractions

À l’époque où je grandissais , les distractions de plein air avaient deux avantages : on les avait sous la main et elles ne coûtaient pas cher. On manquait de tas de choses à Whitefish, mais du grand air, on en avait autant qu’on voulait, et à deux pas de chez soi.

Les airelles

La raison d’être de ce petit voyage, selon les souvenirs d’Ella, était la cueillette des airelles. ce qui paraît logique. Il y en avait à foison, elles ne coutaient rien et elles faisaient de délicieux desserts. D’ailleurs, il fallait avoir une bonne raison de se lancer dans une pareille expédition ; à cette époque, les gens n’aimaient guère reconnaître qu’ils faisaient quelque chose uniquement pour s’amuser.

La période P.P

On pourrait appeler cette période P;P. – pré- plastique. Il n’ y avait pas de ces petits sacs ou pots transparents si commode pour empaqueter vos affaires. Pas de sachets en plastique pour ranger vos maillots de bain mouillés , vos torchons mouillés, vos tout ce que vous voulez mouillés. Pas de détergents. Ce n’était pas seulement avant le plastique ; c’était avant le Nylon, les postes à transistors, les briquets, les bombes aérosols, le papier collant, les stylos à bille et les livres de poche. Quand vous vouliez remballer vos affaires après un repas, les ustensiles étaient trop gras, trop noirs de fumée et trop chauds.

Jouir du confort

Il va sans dire qu’en tant que campeuse, je n’avais pas le feu sacré, autrement je ne repenserais pas à toutes mes expériences dans ce domaine avec un si profond soulagement à l’idée qu’elles sont définitivement révolues. D’un autre côté, si je n’avais pas de tels souvenirs, je ne pourrais pas à l’heure actuelle, jouir aussi voluptueusement des hôtels de luxe. Comment apprécier véritablement l’élégance des cocktails ou des escargots au beurre d’ail si l’on n’a jamais été au bord de la nausée en essayant de faire descendre un déjeuner de lard et de crêpes froides.

L’adolescence

D’ailleurs dans les années 1920, les adolescents n’avaient pas encore été inventés. Il y avait seulement, des grands enfants, des petits enfants et des bébés.

La belle mère

Ce n’était pas que ma mère eût une passion pour sa belle mère, une vieille dame dépourvue de tact, qui l’avait un jour remerciée de lui avoir envoyé une photographie de moi en écrivant :  » Elle vous ressemble, mais elle est néanmoins très mignonne ».

20151218_095309Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque de Dinard dans le thème découverte de l’Ouest américain.

3Seuls ceux et celles qui liront ce roman comprendront le gros plan sur la fermeture Éclair de mon jean. J’avais déjà lu un roman de cette auteure, « le temps des miracles » que j’avais beaucoup apprécié. Ces deux livres sont dans la catégorie « ado » mais peuvent être lus par un large public. À mon avis, celui-ci cible franchement un public jeune, ce qui lui donne un côté bien sympathique.on a parfois l’impression de lire une BD sans image. On part sur les routes du Far West, avec une fille à fort tempérament, pour arriver sur la côte Ouest. Bella Rossa est très belle, rousse grâce à son ascendance irlandaise, d’une énergie peu commune. Elle a des seins superbes, comme des pastèques dit-elle, et dans ce monde qui manque de femmes c’est loin de n’être qu’un avantage. Deux personnages haut en couleur l’accompagnent. Son père paralysé, boit sans arrêt, il crie sur sa fille et sur tous ceux qui s’occupent de lui. Et le plus important pour elle, Jaro, son homme qui n’est pas toujours un cadeau.

Ensemble, ils mèneront leur carriole sur les pistes des chercheurs d’or pour leur vendre des objets pour le moins variés. C’est donc l’occasion de revisiter le Far West avec tous ses dangers (dont la guerre) et des personnages parfois très peu recommandables, un pasteur pervers et lubrique, des fermiers qui lynchent un homme à cause de la couleur de sa peau, un voleur aidé d’un opossum, des femmes trop peu farouches au goût de Bella Rosa… C’est un récit simple et efficace en somme, une bonne distraction pour ceux et celles qui aiment les Westerns. Les personnages ne sont pas caricaturaux et le récit est enlevé. Si on considère que ce roman s’adresse a un public jeune, il est parfait, mais pour des adultes, il manque de profondeur.

Citations

Le tout c’est de trouver le client

Pour palper réellement ce magot, encore fallait-il trouver des clients ! Et, franchement, Jaro n’avait jamais rencontré personne qui eût besoin d’un coupe-œuf ou d’un épineur de raisins secs !

Un moment de grâce

 Et tout ça grâce à ta salle manie d’ouvrir ta braguette à tout bout de champ, s’exclama-t-elle en embrassant Jaroslaw avec fougue.
Dans sa fièvre spéculatrice, elle oubliait toutes les épreuves que Jaro lui avait fait endurer, les pincements affreux de la jalousie, les ravages causés à son cœur et à sa fierté. Elle oubliait les filles au gros derrière, les nuits de solitude à guetter le retour de son, amour, les douleurs qui lui transperçaient le ventre, tout.