2 J’ai suivi l’enthousiasme d’Aifelle et j’ai acheté cet essai Malheureusement, je l’ai acheté sur ma liseuse et je ne peux donc l’envoyer à personne car je ne peux pas dire que j’ai été très intéressée par les mémoires de cette femme hors du commun et ce livre n’aurait certainement pas encombré les rayons de ma bibliothèque.

Oui , sa vie est extraordinaire mais la sécheresse de sa plume a bien du mal à nous en rendre compte. Elle écrit qu’elle a rédigé ses mémoires trop tard , c’est l’excuse que je lui accorde volontiers . Trop tard sans doute pour nous permettre de revivre avec elle les angoisses d’une jeune fille juive dans les années de guerre de l’Allemagne nazie. Son histoire est stupéfiante, son père belge décide en 1939 de faire vivre sa famille en Allemagne alors que sa femme est juive . Tout le monde lui dit de ne pas accomplir cette folie et sa femme de milieu très aisé et de nationalité américaine décide d ‘y aller.

Tout est incroyable dans cette histoire dont je ne doute pas de la véracité, sa mère s’est décidée ainsi à partir en Allemagne :

« En désespoir de cause , ma mère se livra à une véritable partie de poker. Elle consentirai à le suivre à une condition : qu’il (son mari) révèle à ses correspondants allemands l’origine juive de sa femme. Mon père accepta. Ma mère nourrissait le fol espoir que les Allemands mis au courant renonceraient au projet de nous faire venir en Allemagne . Ils enregistrèrent l’information , sans modifier leur proposition. ».

Une fois en Allemagne , la vie est difficile et surtout ils ont faim , les persécutions anti juives , elle ne les voit pas et même s’ils ont peur ,cela ne les empêche pas de mener une vie à peu près normale. Rien de l’ambiance étouffante que décrivent si bien les témoignages des rares juifs ayant survécu au nazisme. C’est un pays triste et où l’on a faim , soumis à des bombardements intensifs.

Ils espèrent la victoire des alliés et se retrouvent aux USA avec leur famille sauf le père qui restera à Bruxelles. Sa vie aux US est facile mais elle n’arrivera pas à se sentir américaine dans ces banlieues trop propres où elle s’ennuie. Il y a là, quelques remarques qui m’ont intéressée.

Bref un livre fade pour une vie qui ne l’a pas été.

 Citations

Le mal de mer (je connais quelqu’un qui répondrait oui à cette interrogation)

Nous courions toute la journée pour trouver les personnes et recueillir les informations, n’avions jamais le mal de mer. Se peut-il qu’une activité intense vous en protège.

Incommunicabilité des témoignages, et pour elle il ne s’agit que des privations pas des camps de la mort dont elle ne parle pas.

J’ai vite compris que je n’arriverai pas à communiquer mon expérience , qu’il fallait que j’accepte ce fossé qui me séparait d’une partie de l’humanité incapable d’imaginer les horreurs et les privations de la guerre.


Si vous ne connaissez pas Babelio, voici la phrase qu’ils m’ont demandé d’insérer, je le fais volontiers car je vais souvent sur ce site où je mets toutes mes critiques et je participe à « Masse critique » qui m’a permis cette fois de recevoir ce livre.

Babelio vous demande un petit service, c’est bien entendu facultatif, mais si vous souhaitez nous donner un coup de pouce nous vous en serions très reconnaissants. Vous serait-il possible d’insérer ce court texte dans votre billet de blog :

Que vous aimiez Jean d’Ormesson. ou Et si c’était vrai…., Nietzsche. ou La formule de Dieu., Babelio vous invite toute l’année à découvrir les meilleurs livres. en participant aux clubs de lecteurs. en allant sur Babelio.com.


Parlons du livre de Régine FRYDMAN (je ne mets pas de coquillages à propos d’un témoignage qui ne prétend pas à une valeur littéraire mais qui est indispensable pour l’humanité). Je pense que certains d’entre vous diront encore un livre sur les massacres de juifs , il y a eu tant d’autres massacres depuis. Je fais partie de ceux qui considèrent n’être jamais assez informés sur ce sujet et je crois que plus nous sommes vigilants moins nous craindrons les risques du retour de la barbarie. L’originalité de celui-ci, c’est de retracer la vie d’un homme qui a décidé de survivre et de sauver sa famille , il s’est démené comme un fou et il a réussi. Est-il plus chanceux que d’autres ? Oui, mais surtout il est animé d’une énergie peu commune.

Sa fille a rassemblé ses souvenirs et elle intervient parfois dansle récit quand un événement de son enfance rejoint le récit de son père. Elle sait que les témoins survivants sont peu nombreux et qu’elle se devait de transmettre cette mémoire. S’il a eu la chance de survivre, il a vu aussi un maximum d’horreurs , l’humiliation, les tortures, la faim le manque total d’humanité des Allemands vis à vis des juifs, vieillards , femmes enfants ils n’avaient qu’une envie les tuer et les humilier. On sait tout cela , mais ce livre apporte aussi un éclairage très cru sur l’antisémitisme polonais. Après la guerre ; son père relance un commerce qui marche assez bien , mais sous un nom catholique , car il sait que si on apprend qu’il est juif il perdra tous ses clients.

Ce livre rappelle Le Pogrom de Kielce du 4 juillet 1946 ou 42 juifs trouveront la mort. Les Polonais ont beaucoup souffert de l’occupation nazie mais ils étaient ,et ont été longtemps, des antisémites virulents. Il faut dire également, que cette famille ne doit ne sa survie qu’à quelques Polonais qui ont accepté de les aider pendant toute la guerre comme ce monsieur « X » qui a été absolument admirable.

 Citations

 En 1939, les Russes n’accueillent pas facilement les juifs polonais

 Nous partîmes avec mon beau-frère, le chariot chargé de marchandises, de cuir, de coupons de tissu et de sucre (environ 20 kilos) , denrée alors la plus recherchée avec le sel. Ma femme était enceinte de huit mois . Nou sarrivâmes à Malkinie où nous fûmes refoulés par les Russes, qui nous renvoyèrent aux Allemands.

Tristesse à l’évocation des souvenirs de la guerre

Je suis retournée à Varsovie en 1993 avac ma sœur Nathalie …. En chemin, le chauffeur nous raconte qu’il se souvient lui aussi du ghetto. Comme beaucoup d’autres habitants de Varsovie, sa mère l’emmenait devant les portes voir les hordes d’enfants affamés qui risquaient leur vie pour un morceau de pain. Fier de lui, ce chauffeur , qui avait le même âge qu’eux, avait un jour jeté un quignon de pain à un gosse du ghetto qui l’avait avalé d’un seul coup. Encore aujourd’hui il n’en revenait pas ! Oui , les Polonais ont beaucoup souffert pendant la guerre, mais au moins eux, il sont eu quelques distractions.

 En 1946 la plus jeune de leur fille a vécu la guerre dans un orphelinat catholique et elle ne sait pas encore que sa famille est juive, ils se dissimulent sous un nom catholique

 Un soir, Nathalie rentra de l’école en pleurant. On lui avait dit en se moquant qu’elle ressemblait à une Juive avec ses cheveux noirs et ses yeux noirs.

 

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Petit livre (180 pages) découvert grâce à un ami historien, à mon tour je le recommande chaudement ! 
Pauline de Pange, « la princesse Pauline de Broglie, naît en 1888 dans une des plus prestigieuses familles aristocratiques de France », comme nous l’apprend l’introduction.

 

Dans une langue assez plate, elle nous décrit la vie de sa famille en 1900. Et c’est tout simplement passionnant , vous pourrez écouter le document d’archive de l’INA que j’ai mis en fin de mon billet. Je dois dire qu’elle m’a plus agacée quand elle raconte que lorsqu’elle écrit.

Parlons d’abord de son style, on sent la grande aristocrate qui a appris à garder pour elle toutes ses émotions et ne jamais s’étonner de rien à propos des conduites humaines. C’est sans doute pourquoi elle raconte sa vie sans pathos ni effets, qu’elle aurait sans doute jugés, déplacés.

 Cela donne aussi un grand intérêt à ses souvenirs, car en général, quand on est plongé dans ce genre de récit , ils sont, soit teintés de nostalgie : »quel monde merveilleux , hélas : ! disparu ! » , soit écrit sous le ton de la révolte. L’auteur prenant,alors,le point de vue des humbles exploités par cette aristocratie qui n’abaisse pas son regard jusqu’au petit peuple si misérable.

Pauline de Pange évite ces deux écueils , elle raconte et nous dit : voilà c’était comme ça. On apprend une foule de détails et un monde complètement disparu vit devant nos yeux. La domesticité, la nourriture et le cérémoniel pour servir les repas, l’habillement les codes sociaux l’éducation ,les bains de mer, l’instruction, la religion, la politique, l’affaire Dreyfus…

Les femmes de ce monde s’ennuyaient beaucoup, elles ne pouvaient rien faire elles-mêmes puisqu’il y avait un domestique pour tout. Des ouvrages de dames, des tricots de laine grise pour les pauvres et des broderies, seulement commencées puisqu’une domestique atitrée avait pour charge de les finir. Il y avait même un employé pour remonter les horloges !

Je pense que c’est une pierre à l’édifice de la grande histoire et surtout c’est un complément indispensable à la lecture de Proust. Voilà le contre point non littéraire du monde qu’il a su si bien animer , j’ai eu l’impression de lire le canevas (100 pages) de « La recherche ».

 Je me suis beaucoup amusée à l’évocation des créations techniques, le cinéma, la bicyclette, la voiture et le téléphone.. ah les demoiselles du téléphone qui ne respectent pas le titres des aristocrates ! Ce qui m’a le plus étonnée c’est le peu de cas que l’on faisait de l’instruction de cette princesse dans une famille qui pourtant avait des idées libérales et dont la devise est « pour l’avenir ».

Voici la demeure des de Broglie en Normandie :

 Citations

Le cérémoniel des repas

Je précise que l’enfant a sept ans et je n’en reviens pas qu’elle puisse boire du vin à cet âge ! Et après cette description que j’ai abrégée on ne s’étonnera pas qu’elle dise plus loin que tout le monde avait « la goutte » passée 50 ans !

On servait sur des plats d’argent d’énormes pièces de viande toutes saignantes et baignées de sauces fortes ….. ; des jambons entiers garnis de collerettes de papier, des pâtés de gibier, des daubes , des chauds-froids, des galantines,. Les potages étaient un tour de force car il fallait les varier chaque jour sans jamais , sauf les vendredis , servir des soupes maigres……Le maître d’hôtel découpait devant nous sur un plateau de bois les volailles toutes ruisselantes de graisse. Armé d’une fourche à deux dents et d’un immense couteau , il saisissait la pièce : canard, dinde, poularde,perdreau , faisan ou bécasse, et en un tournemain il débitait les morceaux qu’il disposait avec art sur le plat d’argent …..

Le menu, matin ou soir , se composait toujours de sept à huit plats . Une entrée (généralement des œufs), un plat de viande avec pomme de terre , une volaille rôtie, un plat de légumes , un entremets….

Pourvu que je me tienne bien droite on ne me faisait aucune observation . Je buvais de grands verres de vin rouge et je reprenais de tous les plats. La conversation , à laquelle j’étais censée ne prendre aucune part ni même écouter , était très animée.

Et ce passage qui m’a tellement étonnée,la visite dans une école que ses parents ont financée

Souvent ma mère m’emmenait le samedi pour distribuer des récompenses aux élèves. Ces séances hebdomadaires étaient pour moi un supplice. Je me rendais parfaitement compte que toutes ces petites filles étaient plus instruites que moi. Je rougissais d’entendre poser des questions à des enfants de six ans , auxquelles je n’aurais pas pu, à huit ou dix ans répondre. Un jour l areligieuse me demanda persuadée que j’allais briller par ma science, la solution d’un problème très simple qui était au tableau. C’était une règle de trois dont je ne savais pas le premier mot. Je fus lamentable ! Ma mère riait , n’y attachait aucune importance , disant : »Elle en saura toujours assez, moi je ne sais pas faire une addition ! »

Je n’ai pas trouvé de blogs qui en parlent, lisez le vite, et je mettrai un lien vers votre blog. Si vous voulez l’entendre : http://boutique.ina.fr/video/CPF86621209/la-vie-comparee-de-madame-la-comtesse-de-pange-et-de-monsieur-robert-galley.fr.html

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Un très grand plaisir de lecture, dans un moment de découragement. Tout le monde connaît, du moins je l’imagine, un moment où tous les livres perdent leur saveur. Je me réfugie alors dans la lecture des blogs et je partage vos passions mais de loin sans complètement y croire. Or voilà un petit bijou dont j’aimerais vous parler.

Un intellectuel japonais est tombé follement amoureux de la langue française. Il raconte son périple et ses joies. Moi qui, dans une autre vie, ai enseigné à des étudiants étrangers, j’ai retrouvé avec émotion les efforts et les joies que représentent le passage d’une langue à une autre. Akira Mizubayashi avec la délicatesse japonaise adopte peu à peu la culture française, évidemment , la Française que je suis, se sent fière et un peu étonnée d’un tel amour pour Jean-Jacques Rousseau. Sa sensibilité à l’oralité passe aussi par la musique et là surprise c’est à Mozart qu’il doit l’éducation de son oreille.

Ses pages sur le personnage de Suzanne dans Les noces de Figaro m’ont rappelé de très bons moments de mes études universitaires : lorsqu’un enseignant savait au détour d’une explication nous faire revivre tous les enjeux d’un héros de roman ou d’un personnage de théâtre. Beaumarchais est un auteur qui ne m’a jamais ennuyé et dont la modernité me surprend aujourd’hui encore. Mozart en fait un chef d’œuvre à l’opéra, on est décidément en bien bonne compagnie avec Akira Mizubayashi !

L’autre moment que je vous recommande, ce sont les pages consacrés à son père. Il est rare de lire chez les romanciers japonais une critique du régime nationaliste qui a conduit leur pays à mener des guerres impérialistes et racistes Son père a souffert de ce régime et s’est réfugié dans l’amour de la musique occidentale alors totalement interdite (je ne savais pas qu’à l’époque écouter Beethoven était passible de condamnations). Il a surtout aimé ses fils et s’est totalement consacré à leur éducation, après avoir lu ce livre vous n’oublierez pas le dévouement de ce père qui accompagne son aîné pendant les 14 heures de train qui séparent leur ville natale de Tokyo où résidaient le professeur qui pouvait donner des leçons de violon.

Mais ce qui me ravit dans cet ouvrage c’est l’analyse très fine des différences culturelles qui passent par la langue entre le japonais et le français. Qui peut croire, par exemple que le « Bonjour messieurs dames », lancé à la cantonade dans un commerce puisse mettre aussi mal à l’aise un Japonais qui y voit une intrusion insupportable dans la vie privée d’autrui ?

J ai aimé ce livre de bout en bout, ce n’est pas une lecture passionnante mais j’étais bien avec cet homme si délicat qui aime tant notre langue et notre littérature.

Citations

Les raisons qui l’amènent vers la langue française

(c’est assez amusant quand on se rappelle des discours des étudiants français de l’époque !)

Dans les années 1970, la politique était encore très présente sur les campus universitaires…..Ce qui gênait le jeune homme de dix-huit ans …..c’était le vide des mots : des gauchistes, comme des revenants sur un champ de bataille où gisent des cadavres mutilés, usaient inlassablement de discours politiques stéréotypés à grand renfort de rhétoriques surannée…..

Le français m’est apparu alors comme le seul choix possible, ou plutôt la seule parade face à la langue environnante malmenée jusqu’à l’usure , la langue de l’inflation verbale qui me prenait en otage.

L évocation de son père

Le piano droit Kawai, le livre de Carl Flesh et le magnétophone Sony .. trois objets-témoins, trois objets-souvenirs. Trois objets culturels de valeur monétaire fort inégale. Trois substituts de la présence et de l’attention paternelle. Ils portent en eux le désir et la volonté d’un homme qui s’acharnait à repousser toujours plus loin les limites de son champ d’action, qui faisait l’impossible pour sortir de ses origines, de sa condition première, pour s’arracher à ce qui lui était primitivement et naturellement imposé….

Le français est ma langue paternelle.

 Les différences culturelles

Saluer des personnes inconnues ? Et oui, cela est fréquent en France ; il suffit de se promener dans les rues de Paris ou de prendre le métro, d’être attentif aux spectacles qui s’offrent ça et là dans les lieux publics. Tandis que dans mon pays, un tel geste, potentiellement créateur de liens est perçu comme une violence inacceptable ou au moins comme une incongruité suspecte.

 Son amour du français

La langue d’origine, maternelle, demeure inarrachable. Mon français va donc mourir avant même que ne meure mon corps ? Triste vérité. Mais je me considèrerai comme mort quand je serai mort en français. Car je n’existerai plus alors en tant que ce que j’ai voulu être , ce que je suis devenue de mon propre gré, par ma souveraine décision d’épouser la langue française.

On en parle

À sauts et à gambades et keisha en 2011.