http://www.laprocure.com/cache/couvertures_mini/9782848761657.jpg

 Traduit de l’Anglais (Afrique du Sud) par Françoise ADELSTAIN.

http://www.babelio.com/images/masse_critique.jpg

 

 

4
C’est la première fois que ma participation à « masse critique » de Babelio est un succès total. Je ne pense pas que j’aurais entendu parler de ce livre autrement et c’est injuste pour la qualité de ce récit. Ce roman est absolument passionnant surtout pour la peinture de l’Afrique du Sud dans les années 60. J’ai une petite réserve à propos du parcours initiatique du jeune Simon, je le trouve un peu trop naïf mais ça n’enlève rien à la force et donne un peu d’humour au roman.

Le récit démarre dans un lycée de la capitale de « l’état libre d’Orange », le héros se retrouve confronté à un élève avec qui il a partagé ses années de primaire, Fanie. Un tournoi de tennis est organisé entre leur lycée plutôt classique et un lycée professionnel fréquenté par des afrikaners que les lycéens anglais méprisent en les appelant « les Clefs-à-molette ». Chaque rappel de ce qui s’est passé entre Fanie et Simon, est l’occasion pour le héros de se replonger dans son enfance. Nous voyons alors se dérouler la vie dans une petite ville de province afrikaner, c’est à peu près l’horreur. Racisme, intolérance, stupidité et étroitesse d’esprit tout cela béni par une religion obscurantiste sont au rendez-vous. Les adultes sont d’une lâcheté et d’une bêtise incroyables. On a parfois du mal à croire que tout cela se passe dans les années 60, on se dirait au début du 20° siècle. Le racisme n’est pas tant envers les noirs qui sont à peu près absents du livre, c’est entre les afrikaners et les anglais et entre les différentes religions.

Une personnalité noire sera l’objet d’un souvenir : une femme, Mary qui, pendant 8 ans, a lavé les cheveux dans un salon de coiffure et est mariée avec le jardinier de la famille de Simon. Un blanc prend sa place et elle est chassée sans aucun état d’âme : c’est la loi ! Il faut dix ans dans le même emploi pour qu’un noir puisse rester dans une ville blanche. Mary retournera dans une tribu à des centaines de kilomètres qu’elle ne connaît pas, laissant derrière elle un mari totalement désemparé. L’humour vient de la personnalité de la mère de Simon qui est un peu moins conventionnelle que les autres habitants du bourg. Le récit de l’instituteur sadique est terrible, mais hélas plausible (et cela pas seulement en Afrique du Sud).

Le jeune Simon se forme peu à peu à la sexualité des adultes dans un pays entièrement sous la domination de la religion, c’est vite de l’ordre du péché, même si c’est un prêtre qui l’initie à la masturbation « réciproque ». Steve, l’ami de Simon et Fanie, a le malheur de ne pas être de leur communauté, donc il sera jugé et condamné et mourra en prison parce que la femme du pasteur est sure qu’il est pédophile (ce qui n’est pas prouvé) alors que le prêtre lui semble très bien être accepté par la communauté et peut continuer à initier les jeunes garçons. Bref un monde étroit et pervers où l’originalité est considérée comme une offense aux « bonnes » mœurs.

J’ai été sensible à l’écriture de Michiel Heynes, (comment ne pas l’être ! et bravo à la traductrice), c’est un grand écrivain : il est nous entraîne dans un monde que je ne connaissais pas, nous fait sourire parfois et nous fait découvrir bien des ressorts cachés de l’âme humaine.

Citations

Le rugby étant le plus important, en réalité l’unique, dénominateur commun de la culture blanche en Afrique du Sud.

Nous en avions donc conclu que le père de Fanie était un homme sobre, et Louis van Niekerk avait déclaré d’un ton péremptoire : « C’est pour ça qu’il est fils unique. »

 

Son père l’avait retiré de l’école pendant un an parce qu’il avait découvert une référence à la théorie de l’évolution dans notre manuel de sciences naturelles.

 

Elle figurait comme dans notre livre d’histoire au titre de foyer d’une petite tribu indigène « amicale » -ce qui signifiait que les autochtones n’avaient opposé aucune résistance à l’occupation de leur terre par les Voortrekkers* (boers)

 

Je révérais tant l’autorité que je respectais même un de ses représentants aussi perverti que Mr De Wet ; je n’ai jamais perdu l’espoir absurde de plaire à cet homme dont le bonheur consistait à faire mail aux autres.

 

Klasie allait prouver que les Boers avaient en réalité gagné la guerre, en démontrant de façon décisive que les historiens anglais avaient falsifié tous les récits des combats, étant donné le fait bien connu que, ayant inventé l’écriture, les Anglais peuvent habiller la vérité à leur image.

On en parle

link

http://storage.canalblog.com/82/04/350527/56384618_p.jpg

3
Cet écrivain sait particulièrement bien décrire les maux de notre époque. Le malaise de Sarah qui ne se sent pas bien dans le monde compétitif où l’on conduit ses études d’économie, permet de décrire tous les travers des entreprises où il faut être toujours et tout le temps, le meilleur et si possible écraser les faibles. Le séminaire de formation est petit morceau de bravoure et, j’en ai bien peur, proche de vérité. Mais ,il est vrai que l’on sait déjà tout ça.
Dans le genre, je préfère l’arrogance d’un Benacquista.

Ce que j’ai vraiment bien aimé,c’est la peinture les problèmes dans lesquels se bat Sarah, brillante étudiante de Dauphine, ses origines modestes la rendaient mal à l’aise avec les étudiantes et étudiants très bourgeois de son université. Son mariage ne la protègera pas du malaise grandissant, souligné par la maladie mentale de son frère Nathan qui lui ne veut ni ne peut s’adapter au monde. Elle part au Japon pour comprendre ce frère tant aimé et finalement, elle se découvrira elle-même.

J’ai été moins séduite par la partie japonaise du roman, on sent l’auteur visiteur du pays mais il n’a pas évidemment toutes les clés du mal de vivre japonais. On reste un peu dans le cliché et la poésie des paysages japonais ne m’ont pas touchée. Beaucoup de lecteurs sont plus enthousiastes que moi, je reconnais à cet auteur un véritable talent pour témoigner d’un certain mal de vivre on se laisse prendre par la lecture et les souffrances de Sarah.

Citations

« Ressemble à une vieille refaite plutôt qu’à une vieille tout court (…) , ajoute le pathétique à l’irréversible »

 

Le jardinage qu’il tenait pour une activité fasciste (garder ce qui est fort, couper ce qui est faible et empêcher le fort d’être plus fort)

 

Parfois je me dis que je suis devenue la cliente idéale pour une secte, quiconque me promettrait le repos, la paix intérieure me verrait rappliquer et lui baiser les mains de gratitude.

 

Personne n’a envie de mourir. Tout le monde veut vivre. Seulement, à certaines périodes de notre vie, ça devient juste impossible.

 

Je l’ai épousé parce qu’il m’aimait et qu’auprès de lui je me sentais en sécurité. Auprès de lui j’avais moins peur.

On en parle

link.

http://ecx.images-amazon.com/images/I/41qoWHG8lgL._SL500_AA300_.jpg

 

Traduit de l’allemand alémanique par Olivier Mannoni

5
Je ne sais pas s’il mérite ces cinq coquillages, mais je n’hésite pas à les donner , je m’explique. Ce livre m’a remis dans le même état que mes lectures d’enfant et d’adolescente, je ne voulais pas le lâcher. Je l’ai lu jusqu’à trois heures du matin, et ce matin je me suis réveillée uniquement pour le finir. J’ai pratiquement pleuré à la description de la mort de l’enfant soldat, j’ai été écœurée par les marchands d’armes. Il m’est arrivé de ralentir la lecture pour savourer les odeurs et les émotions !

Sans doute, en tant qu’œuvre littéraire, il ne mérite pas autant d’éloges. Mais un livre ce n’est pas que le style, qui, par ailleurs, est bon si je peux en juger à travers la traduction, mais sans invention particulière. C’est le récit qui est parfait, j’avais déjà beaucoup aimé « Small World ». Dans « Le cuisinier » le monde actuel est mis en scène : les réfugiés en situation presque régulière, la situation des populations vaincues, ici les Tamouls, mais cela pourrait être des Kurdes ou tout autre peuple victime à la fois d’une nation qui ne veut plus d’eux et d’une guerre de libération sanglante, (Les tigres Tamouls ne sont pas épargnés !), la crise financière, les marchands d’armes , la restauration de luxe et l’ambiance dans les cuisines étoilées… rien de ce qui fait les choux gras des journaux n’est absent de ce roman. Et tout cela mêlé à une intrigue passionnante et une évolution dans les sentiments amoureux peu banales. J’ai trouvé très bien la façon dont martin Suter a décrit l’opposition entre tradition et mœurs occidentaux, rien n’est manichéen tout est traité avec beaucoup d’humanité.

Et je n’ai pas encore parlé du thème central : la cuisine… je pense que tout le monde aura envie d’essayer les recettes de la fin du livre, bien qu’elles semblent horriblement compliquées à réussir, exemple dans le menu promotion :

  • Chappatis au caviar de cannelle et de caloupilé
  • Tandoori de poussins fumés au bois de hêtre sur sa gelée de beurre de tomate
  • Kuffi à l’air de mangue
  • Les recettes du Love-menu, c’est encore plus compliqué et surtout, il faut bien choisir le partenaire avec lequel on les dégustera ….

Ce roman est traduit par Olivier Mannoni et il est si bien traduit qu’on oublie qu’il n’a pas été écrit en français !

Citations

Pour le reste, on trouvait là un importateur de voitures, le propriétaire d’une agence de publicité et un président de banque dont la démission récente n’avait pas été tout à fait volontaire, tous avec leurs grandes, minces, blondes deuxième épouse.

 

– Je croyais que les castes avaient été abolies ?
– Exact. Tu dois faire partie de la bonne caste abolie.

 

– Mes parents ils sont morts en 1983,on a mis le feu à leur voiture.
– Pourquoi ?
– Parce qu’ils étaient Tamouls

Oui. Mais pas du Sri Lanka que j’ai quitté. Juste celui du pays où j’aimerais revenir. Pacifique et juste.

Et réunifié ?

..

Les trois à la fois ? Pacifique, juste et réunifié ? Ce serait bien.

 Et c’est ainsi que pour Maravan, le Tamoul, prépara sans se douter de rien pour Razzaq, le Pakistanais, un repas au cours duquel se nouerait une affaire qui, par quelques détour, permettraient à l’armée sri-lankaise de se procurer des chars suisses d’occasion.

 

– Ce sont des gens comme Dalman qui ont ces enfants sur la conscience.
Maravan balança la tête.
– Non. Ce sont ceux qui déclenchent ces guerres.

Eux, ce sont des idéologues. Bien sûr, ils sont épouvantables, eux aussi ; Mais pas autant que les fournisseurs. Ceux qui permettent les guerres en livrant les armes. Ceux qui gagnent de l’argent avec les guerres et qui les prolongent. des gens comme Dalman.

C’était un silence qui dévorait tout. Un silence plus puissant à chaque seconde qui s’écoulait. …. Et tout à coup, ce silence. Comme un bijou. Un article auquel des gens comme lui ne pouvaient pas prétendre.

Les journalistes n’enquêtent pas sur les révélations de leurs collègues. Ils les recopient.

 

L’amour passe pour une marieuse peu fiable

http://www.lexpress.fr/imgs/13/502.jpg

Traduit de L’anglais par Christiane Besse

3
Trois coquillages ! Pour un excellent roman, oui mais voilà je ne suis pas fan du genre policier. J’ai pourtant adoré « La vie aux aguets » du même auteur. Disons que c’est un trois coquillages qui en vaut quatre…. L’intrigue est très bien menée mais la fin est étrange ou appelle une suite.

La vie londonienne d’aujourd’hui est très bien rendue, le héros doit passer inaperçu dans la capitale anglaise, j’ai trouvé passionnant de suivre l’imagination de l’écrivain pour que Adam devienne invisible aux yeux d’une ville entière. Police et Mafia sont à ses trousses et il arrive à survivre. C’est l’occasion aussi de connaître de plus près les exclus de la société anglaise. Et comme les méchants sont des gens qui travaillent dans les hautes sphères de la finance te des laboratoires pharmaceutiques, on voit aussi la haute société dans tout ce qu’elle a de déplaisant. Le grand complot autour d’un médicament plaira à tous les amateurs de romans policiers.

J’ai trouvé intéressant la traversée dans la maladie d’un personnage, son médecin lui parle de symptômes dus au stress alors qu’il a une tumeur au cerveau. Pour avoir eu une amie qui a connu la même tragédie, j’ai trouvé cela très réaliste. J’ai lu dans la blogosphère que c’était un bon William Boyd, je l’ai dit au début j’ai préféré « La vie aux aguets », mais, le moins qu’on puisse dire, c’est qu’on ne s’ennuie pas, que les personnages sont intéressants un peu à la limite de la caricature parfois. Depuis que le traducteur de Suter, m’a écrit un mail je souligne le travail de la traductrice : Christiane Besse. Il faut que j’avoue je n’ai qu’un critère pour dire qu’une traduction est bonne : j’ai l’impression que le livre est écrit en français.

Citations

 Ingram avait horreur d’exhiber, quand il s’asseyait jambes croisées un mollet blanc poilu entre le haut de la chaussette et le revers du pantalon- c’était en quelque sorte le prototype du péché capital vestimentaire anglais.

 

Il sentait instinctivement que la seule manière d’éviter d’être repéré dans une ville du vingt et unième siècle était de ne tirer aucun avantage des services qu’elle offrait –téléphonique, financiers, sociaux, municipaux ou autres.

 

Jonjo tira un peu sur la laisse du Chien et ils s’en allèrent. Il aurait préféré rôtir en enfer plutôt que de suivre son chien avec un sac en plastique pour ramasser sa merde.

 

La redoutable Déesse Stress. Elle peut faire les choses les plus étranges à un corps

On en parle

link

3
Sur la couverture, c’est écrit « Thriller », on peut donc s’attendre à de l’horreur, du sang de la peur de l’angoisse. C’est plus subtil que ça, on y retrouve toutes les failles de notre monde avec une petite pointe d’exagération, ce qui rend alors le tout absolument insupportable. Ce roman est dérangeant, également, car c’est une attaque en règle contre la génération des « baby-boomers » tellement égoïste, et c’est ma génération ! Je donne un exemple des procédés utilisés. Dans ma région, les paysans produisent les ¾ des choux-fleurs pour toucher la prime européenne à la destruction des légumes non vendus.

On peut se demander pourquoi ils continuent à produire des choux-fleurs que personne ne mange, mais bon c’est comme ça ! Dans le roman c’est la production animale qui subit le sort des choux-fleurs bretons. Les trains transportant des carcasses avariées dégagent des odeurs peu ragoutantes, avant d’arriver à destination où elles seront transformées en ciment. Tiens, tiens on a déjà vécu ça non ?

Inquiétant ! C’est la même compagnie qui s’occupe du train des « baby-boomers ». Plus le train avance, plus se dévoilent les turpitudes des uns et des autres, des pans entiers de l’économie de la société de profit du culte de la jeunesse sont passés au crible de la critique du romancier, évidemment, on doute de plus en plus du paradis promis à l’arrivée des voyageurs de l’eternity-express.

Peut-on avoir de la compassion pour ces soixantenaires du train, eux qui n’ont connu qu’une vie facile, et qui n’ont recherché que le plaisir à tout prix ? Pour l’auteur certainement pas, ils ont eu tout faux, ils laisseront après eux une planète dévastée. Ce n’est franchement pas un roman qui remonte le moral, quand je pense que l’an dernier j’étais dans « le cercle littéraire des mangeurs d’épluchures de patates  » ou « La tombe du mec d’à côté  », les étés se suivent et ne se ressemblent guère. Sauf pour la pluie fidèle au rendez-vous !

Citations

Comme toujours pour mobiliser les masses, il avait suffi d’une grande peur et d’un grand mensonge. Pour lancer l’Eternity rush, on avait fait donner la mer des peurs – celle de la mort- et le plus antique des mensonges- celui de la jeunesse éternelle.

 

 Du fait de leur abandon, ces moribonds étaient de véritables mines d’or et les mois qui leur restaient à vivre se transformaient en calvaire médical.

 

Comme tous tes distingués confrères. Vous vous rêvez docteurs en vie éternelle, vous finirez ingénieurs en mort douce.

http://img.over-blog.com/196x300/2/90/12/86/le-ruban-rouge.jpg

Traduit de l’espagnol par Isabelle Gugnon

1
Ouvrez le lien que j’ai mis à la fin de mon texte, et vous verrez qu’on peut adorer ce livre que j’ai personnellement détesté. (De là, à le comparer avec  » Les mémoires d’Hadrien » de Marguerite Yourcenar… à vous de juger !). Je ne cours pas après les romans historiques, mais alors celui-là, c’est exactement ce que je déteste. Je le pense assez racoleur pour connaître un certain succès et pour un roman d’été il ne fatiguera personne. Comme on y parle beaucoup de sexe, il peut plaire. Je ne supporte pas le mélange des genres, entre les explications pseudo historiques et les romans d’amour de la belle madame Tallien, l’auteur non seulement ne choisit jamais, mais explique le comportement des personnages par nos façons de penser actuelles

La rédaction des mémoires de cette trop jolie femme espagnole qui a résisté à trois maris , beaucoup d’amants et aux épisodes les plus sanglants de la révolution française devait sembler un bon sujet romanesque, hélas ! c’est peut être trop romanesque justement. Pour un public étranger qui ne connaît ni la révolution, ni cette période, il y trouvera peut-être un peu d’intérêt mais j’en doute. L’érudition distillée dans ce roman est insupportable. On a l’impression que l’auteur a écrit en consultant Wikipédia pour chaque personnage et même pour certains objets (voir ce qu’elle écrit sur le condom ou Madame Tussauds puis l’article de Wikipédia). On a eu l’occasion de lire tellement d’ouvrages passionnants sur la révolution française, c’est vraiment dommage que, celui consacré à cette figure féminine, soit si peu sérieux. Je ne reproche pas le côté féminin du point de vue sur les événements, je pense même que c’est le seul intérêt du roman, ce qui m’est insupportable c’est l’absence de profondeur du personnage. Et du coup le roman tombe à plat, le côté historique est plus que superficiel , alors il reste quoi ?

En refermant le livre, je me suis demandé s’il ravivait quelques souvenirs de mes cours d’histoire, pas grand-chose il est vrai. Je me souvenais que Madame Tallien avait échappé à la guillotine. C’est vrai que sa vie est beaucoup plus passionnante que ce simple épisode, et je pense qu’à l’occasion je me plongerai dans un véritable ouvrage historique.

 Citations

Une dame riche ayant des amants est une grande dame ; une femme pauvre et volage n’est en revanche qu’une garce.

 

Savoir de quel pied boite l’ennemi est toujours utile au moment de l’affronter.

On en parle

En bien : link, en beaucoup moins bien : link.

http://ecx.images-amazon.com/images/I/51Q46SCTEFL._SL500_AA300_.jpg

4
Merci Dominique pour ce délicieux conseil. J’avais demandé un conseil de lecture : j’étais en train de lire une série de livres plutôt éprouvants . Et, j’ai reçu ce cadeau de lecture !

Il y a parfois des coïncidences agréables :

  • J’ai visité Bruges très récemment
  • Cet été, mes quatre petits fils ont su, à leur manière, me dire qu’ils étaient heureux que je sois leur « grand-mère »
  • Ma mère s’appelait Thérèse et ma grand-mère Augustine

La grand-mère du livre, celle que l’écrivain sait si bien faire revivre : Thérèse-Augustine ! L’amour du petit fils pour sa grand-mère est très bien raconté et ne peut que vous émouvoir. Il sait donner vie à cette femme qu’une trop rude enfance paysanne, voulait laisser dans l’ignorance de la culture.

Thérèse-Augustine découvrira les plaisirs de la lecture avec son petit fils, c’est une belle leçon d’optimisme pour ceux à qui l’âge fait peur. L’auteur sait aussi, (sa biographie nous dit que Charles Bertin est poète) décrire les plaisirs des jardins et dela mer. Certaines pages sont de petits poèmes en prose. Un court mais réel plaisir de lecture, un livre que je recommanderai à mon tour.

Citations

Elle ne pardonna jamais à son père la violence qui lui avait été faite en la retirant de l’école à douze ans. Ce fut le vrai drame de son existence : un demi-siècle plus tard ; l’amertume d’avoir été flouée la tenaillait toujours.

 

Au fil des mois, la pratique des livres dans laquelle elle n’avait vu à l’origine que le symbole de sa libération et l’instrument d’une revanche sur le destin, finit par se muer en passion toute pure.

 

O Thérèse-Augustine, ma grand-mère des groseilles de juin qui tricotiez en me racontant votre vie sur le perron aux capucines, bien des poètes, c’est vrai, firent moins bien que vous.

Pour le style

Mais la véritable fête, c’est la lumière qui me la donnait : les jeux conjugués de la pluie et du soleil transformaient mon repaire de verdure en une manière de grotte océanique où tous les tons du vert, du jade au céladon, de l’émeraude à l’aigue-marine, rivalisaient dans cette pénombre élyséenne criblée de rayons. La plus mince ramure baignait dans une mousse de lumière dorée qui paraissait puiser son éclat à quelque fabuleuse source intérieure. Je ne me lassais pas de contempler à travers l’épaisseur du feuillage encore nappé de pluie, mais d’où montaient déjà les premières vapeurs, l’irisation des gouttes suspendues qui, durant un moment dont j’aurais souhaité prolonger les délices, continuaient l’une après l’autre à se détacher, comme à regret, de l’extrême pointe des feuilles vernissées. Je ne savais pas encore que je découvrirais dans cet avènement éphémère d’une œuvre de la nature une préfiguration du plaisir que je trouverais un jour dans les accomplissements de l’art des hommes.

http://www.decitre.fr/gi/77/9782070379477FS.gif

Traduit de l’espagnol par Edouard Jimenez et Jacques Rémi Zéphyr.

3 Le Mexique, sa cuisine, sa révolution, son imaginaire et surtout ses femmes et leur rapport à l’amour. Merveilleuses et tyranniques les femmes du Mexique sont à la fois attachantes et effrayantes. Je dois la lecture de ce roman au blog « Enlivrezvous », pour le coup on ressort de ce livre « enlivré » d’amour et de cuisine. J’ai bien aimé, d’où trois coquillages, mais le merveilleux d’Amérique latine n’a jamais été ma tasse de thé (ni mon verre de téquila, on boit beaucoup aussi dans ce livre). Tita est un beau personnage très touchante dans sa volonté de vivre malgré la tyrannie de sa mère. Son histoire d’amour est superbe et totalement impossible évidemment puisque sa mère ne la destinait qu’à s’occuper d’elle jusqu’à sa mort.

Tout ou presque se passe dans la cuisine, chacun des douze chapitres portant le nom des douze mois de l’année commence par une recette de cuisine. Donc on voit Tita et les autres femmes éplucher, écraser, battre, tamiser, pétrir, rouler…. tous les gestes de la cuisine, dans des odeurs d’épices, de friture, de plats qui mijotent de chaud de frais … dans une atmosphère où tous les sens sont en éveil. Une forte sensualité se dégage de tous les chapitres. En arrière plan, la révolution mexicaine mais ce n’est pas très important, les troupes passent il faut les nourrir sinon les soldats se nourriront en volant tout ce qui se mange.

L’important c’est la tyrannie d’une mère qui fera le malheur de toutes ses filles, par respect de la tradition. Elle a pourtant été, dans sa jeunesse, victime de ces mêmes traditions. Ou c’est peut être parce qu’elle même a été malheureuse qu’elle s’acharne ainsi sur ses filles. Le côté merveilleux apparaît comme une exagération épique : ils se consument d’amour : ils brûlent vraiment et avec eux toute la ferme. Elle aime tellement le bébé de sa sœur qu’elle le nourrit au sein par amour elle aura une montée de lait.

Comme je l’ai dit au début, j’ai toujours du mal à accepter ce genre de merveilleux, mais dans ce roman là je trouve que ça passe assez bien.

Citations

Si c’est pour demander ta main, qu’il s’en dispense. Il perdrait son temps et me ferait perdre le mien. Tu sais parfaitement qu’étant la plus jeune des femmes, c’est à toi de veiller sur moi jusqu’au jour de ma mort.

 

Si Tita ne pouvait ni se marier ni avoir d’enfants, qui donc la soignerait sur ces vieux jours ? Quelle était la solution judicieuse dans ce cas ? Ou bien ne s’attendait-on pas à voir les filles qui étaient restées pour s’occuper de leur mère survivre longtemps au décès de leur génitrice ?

 

Le bruit des marmites entrechoquées, l’odeur des amandes dorant sur le comal, la voix mélodieuse de Tita qui chantait tout en faisant la cuisine, tout cela avait réveillé son instinct sexuel.

 

On en parle

Coup de coeur chez « enlivrez-vous » : link. Et aussi plus critique : link.

97823559309733
Qui n’a pas été une fois dans sa vie saisi par l’angoisse d’avoir envoyé un mail ou un texto au mauvais moment, à la mauvaise personne ? C’est le point de départ du roman et aussi la fin. Thomas, l’employé modèle, a-t-il bien fait la veille des vacances d’été de répondre au siège de New-York et de s’engager à fournir une analyse de la plus grande importance pour sa boîte. L’été justement, où pour lui tout va si mal, car il se retrouve face aux souvenirs de tous ses échecs et de ses impuissances. Petit à petit, le romancier démêle les fils qui rendent Thomas si antipathique : la perte de son frère jumeau, sa lâcheté à l’annonce de la grossesse de son premier amour, tout cela s’est passé dans l’île de Noirmoutier. Comme dans tous les lieux de vacances traditionnels, les Français savent si bien reconnaître les origines sociales, tout en faisant mine de se libérer de toutes les contraintes de l’année de travail.

Il y a de l’Étranger dans ce Thomas, avec ce clin d’œil un peu lourd ( ?), il prononce la même phrase que Meursault :

Aujourd’hui maman est morte, ou peut-être hier, je ne sais pas.

Hélas ce n’est pas du tout, la même écriture ! J’ai failli refermer à la première ligne.

Attention Déconnage immédiat au fond du couloir.

J’aurais eu tort. Le style m’a souvent gêné, on y « bouffe » on y « déconne » on « s’en fout » …mais le personnage avec tous ses enfermements est intéressant. La peinture de la France des classes aisées en vacances m’a fait sourire plus d’une fois. Ça manque, quand même, terriblement d’humour. Les auteurs français se complaisent à raconter les tensions familiales, c’est un trop petit monde : on a envie de lui conseiller de voyager un peu et de lâcher prise. Il le fait une fois lorsqu’il voit une enfant trisomique éclater de rire devant un spectacle de clowns. C’est pratiquement la seule note d’espoir du roman :

N’y avait-il pas une place pour chacun, voire pour lui-même ? Une toute petite place pour applaudir les clowns. Même s’ils n’étaient pas drôles, simplement parce qu’ils étaient là.

http://www.laprocure.com/cache/couvertures_mini/9782070127764.jpg
3
Comme l’a écrit un critique, c’est agaçant de savoir qu’il y a un effet de surprise à la fin du récit. À cause de cela, on ne lit pas ce livre de la même façon, on cherche à ne pas se laisser surprendre. C’est bien dommage, car ce roman est avant tout une évocation de l’Angleterre de l’entre deux guerres où il ne faisait pas bon d’être une femme seule. Les efforts qui amèneront Gladys, veuve de guerre, à trouver un moyen pour se réaliser et parfois simplement survivre, sont pathétiques. La montée du fascisme, le souvenir de la grande guerre, la crise économique tout cela est évoqué et assez bien rendu.Les rapports entre la cantatrice et son accompagnateur, et les remarques sur la technique du chant sont intéressants, mais ont peu de rapports avec le reste du livre. Les limites du roman qui font aussi son charme, c’est un côté très « british », comme un détachement par rapport au récit qui le rend ennuyeux parfois.

 Citations

…un dépôt de gerbe au Cénotaphe, le monument aux morts de Whitehall. Pour donner un peu de passé à des morts qui n’avaient pas eu le temps.

 ..le commandement qui figeait tout le monde au garde-à-vous. On sentait derrière lui la présence d’une cohorte de grands morts.

…. Une Emma qui aurait survécu, qui s’avalerait à petites doses le poison de la vie conjugale.

La vérité pour être comprise a d’abord besoin d’être crue ( William Blake)