Éditions Zulma, 285 pages, février 2022.
traduit du Hongrois par Judith et Pierre Karinthy
(Je me suis demandé si les traducteurs avaient un lien de parenté avec l’auteur.) Cette histoire avait vraiment tout pour me plaire : Budaï est un linguiste de renommée internationale (l’auteur est lui même linguiste et ça se sent), il est attendu pour une conférence à Helsinki. Mais il atterrit dans une ville qu’il ne connaît pas et dont surtout il ne comprend pas un seul mot. Lui, qui parle une dizaine de langues, n’arrive absolument pas à se faire comprendre. J’avais espéré que le roman se pencherait surtout sur cet aspect comment décrypter une langue que l’on ne comprend absolument pas. Mais visiblement en ce Hongrois se cache un Kafka et l’absence de communication se double d’un monde comment absurde et dangereux. Budaï va de mauvaise décision en mauvaise décision, jusqu’à agresser un policier en espérant trouver là une personne qui chercherait qui il est . Le personnage cherche à comprendre comment fuir cette ville, mais tous ses essais l’enferment un peu plus dans un monde où il risque sa vie. Je me demande si ce livre ne représente pas le cauchemar des linguistes et des professeurs qui vont de colloque en colloque sans pour autant comprendre les sociétés où ils sont accueillis.
Extraits .
Début.
En y repensant, ce qui a dû se passer c’est que dans la cohue de la correspondance, Budaï s’est trompé de sortie, il est probablement monté dans un avion pour une autre destination et des employés de l’aéroport n’ont pas remarqué l’erreur.
Comment lire une langue sans aucun repère.
Il en revient donc à son journal, le tourne, le retourne, cherchant ce qu’il pourrait en tirer. Ce faisant il fait une découverte aussi surprenante que des agréable. Jusqu’à présent il croyait en effet qu’ici aussi les signes se suivent de gauche à droite les lignes de haut en bas comme dans toutes les écritures européennes, latines ou non. En témoigne la facture, le règlement de l’hôtel ou encore l’annuaire de téléphone emprunté à la réception qui avait disparu de sa chambre par la suite. Mais un examen plus approfondi de ce journal éveille des doutes dans son esprit. Il y a bien un gros titre imprimé en caractères gras et nettement plus grand que le reste sur la première page, mais tout autant sur ce qu’ils croyaient être la dernière. Où faut-il commencer la lecture ? devant ? derrière ? en haut ou en bas ? À moins qu’il ne faille le lire en allers et retours, comme dans l’ancienne écriture grecque quand les lignes se lisaient d’abord de droite à gauche puis à la suite se renversaient en miroir de gauche à droite.