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Henry Bauchau est à mon avis un écrivain majeur de notre époque et j’apprécie toute son œuvre , ce roman me touche particulièrement. Ce livre m’a permis de mieux comprendre l’enfant psychotique, le travail du thérapeute et la création artistique. Les trois thèmes se mêlent dans un laborieux mais superbe aboutissement d’une œuvre poétique et romanesque
La création du langage est vraiment étonnante.

Citations

On était un enfant retardé par une maladie du cœur jusqu’à quatre ans. À l’hôpital Broussais on a été opéré et on a connu la terreur. Heureusement il y a un enfant bleu de sept ans qui a protégé… Parfois la vie devient plus clair, on est moins petit devant ceux qui font les mauvais coups mais souvent le démon est comme un ovni dans le ciel. Les gens se sorciérisent et les autobus hurlent dans les rues qui deviennent noires.

Vocabulaire du peuple du désastre

Bagarrement baïonnetter Bazardifier
Bazarder
bazardement
Bazarbouillis
bazarbouiller Bombardifier
bombardiser
bouilloniser brigandorangé bouillantonner Le catastrophié charabiacés
chauffagiser clocharder débilancolique Débilisé
Débiléfou
débilodélirant
désauvagé Détracté
Détractement
détractouiller déstructifié embalbutié emmerdoubler
ennuiable escarbarbouiller fabricole Gouille-gare Malheurifier
Le malheurifié
malheurisant
maragouiller médiouse orager pachacroute parlerie
rayonniser renversifier résucrrectifier révolvériser Sauvagé
sorciérisé
scandalifiant
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J’ai beaucoup apprécié ce livre en particulier, toutes les remarques sur le vocabulaire et les contresens que nous faisons parfois en donnant au mot le sens d’aujourd’hui. Molière,  » valet du roi » est très éclairant à ce propos. Chaque rituel permet de comprendre la fonction royale mais permet aussi de réfléchir à propos de notre société

Citation

Je me sentis comme élever l’esprit et le courage, je me trouvai tout autre, je découvris en moi ce que je ne connaissais pas, et me reprochai avec joie de l’avoir trop longtemps ignoré. Cette première timidité qu’un peu de jugement donne toujours, et qui d’abord me faisait peine, surtout quand il fallait parler quelque temps en public, se dissipa en moins de rien. Il me sembla seulement alors que j’étais roi et né pour l’être.


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J’ai commencé ce roman avec amusement, persuadée que je n’y trouverai qu’un intérêt modéré. (Ma grand-mère me parlait toujours avec émotion de Madame Coty, c’était son idéal de femme, elle lui attribuait des pensées de compassion pour les pauvres gens – sans doute à cause de la photo où elle sert de la soupe à son président de mari- et surtout Madame Coty était une bonne catholique). J’ai beaucoup aimé le livre du petit fils de René Coty, il permet au lecteur de traverser le siècle par petites touches et analyses assez fines de notre société. L’auteur s’y met en scène avec une honnêteté surprenante.Je pense que mon intérêt vient aussi de la description d’Etretat ou plus d’un dinardais retrouvera des remarques qu’il se fait parfois sur notre « si » petit monde. Je sais que j’offrirai ce livre à des amis de Saint-Lunaire, Saint Briac ou de Dinard. Son dernier chapitre sur le bain dans l’eau de la Manche m’a vraiment ravie.

Citations

Mais le rêve d’amour avait fait place au harcèlement mutuel qui occupe souvent les vieux couples.
 

Chaque dimanche, après déjeuner, les paysans cauchois s’engouffrent dans leur voiture pour aller regarder la mer …tout le reste a changé : les cultivateurs habitent des maisons modernes, reconstruites à l’intérieur des anciennes cours plantées ; leurs bêtes engraissent dans des hangars en parpaings et leur fourrage est protégé par des bâches en plastique sous des piles de pneus.

 

Abrégeons les préliminaires qui constituent, pour cette activité, le moment le plus pénible. Aucune douceur, aucune excitation, aucun frisson d’extase à espérer quand la première vague glacée vient lécher vos orteils. Elle semble plutôt là pour vous faire renoncer, en vous rappelant que, même par beau temps, la mer reste toujours aussi fraîche, très inférieure à la température du corps…… Certains courent aveuglément sur les galets, ils descendent la pente en poussant des cris et entrent dans l’eau comme des soldats de 14 se jetant sous la mitraille ; d’autres hésitent longuement et progressent, pas à pas, dans une relation masochiste avec l’élément.

Traduit du néerlandais par Bertrand Abraham (quel travail !)

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Livre passionnant que je lis, relis, prête, offre avec le même succès depuis 2 ans. Le principe du livre est simple, l’écrivain journaliste part en 1999 retrouver les traces du siècle. Chaque mois de son voyage, il traite un moment de l’Europe, par exemple : janvier 1999 il va chercher les traces de 1900 à 1914 à Paris l’affaire Dreyfus, puis en Grande-Bretagne l’enterrement de la reine Victoria…

C’est passionnant car il s’oblige ainsi, à décaler son point de vue suivant le pays où il est pour des évènements qui concerneront l’ensemble de l’Europe. Comme j’ai une formation de Française et que lui est Hollandais son regard m’a semblé très novateur, j’ai eu l’impression de revisiter toute l’histoire et de mieux la comprendre. Le livre est long mais comme il s’arrête de mois en mois on peut le laisser et le reprendre sans être perdu.

Citations

Freud obtint l’autorisation de quitter la ville dans laquelle il avait vécu depuis sa prime jeunesse. Il partit à Londres, où il allait mourir un peu plus d’un an après. Avant son départ, les nazis exigèrent du patricien mondialement connu une déclaration écrite certifiant qu’il avait été parfaitement bien traité. Freud signa sans sourciller et n’ajouta qu’une phrase : »Je peux cordialement recommander la Gestapo à tous ».

 

Nulle part ailleurs (qu’à la télévision suédoise) je n’ai eu l’occasion de voir cinq acteurs rester si longtemps muets et immobiles à l’écran. Ils devaient être en train de se bouffer le nez je pense.

 

Sabino de Arena fondateur du mouvement indépendantiste basque (avait évoqué dans sa dernière pièce « libe » le destin d’une femme préférant mourir plutôt que d’épouser un espagnol) prit pour épouse une jeune paysanne, uniquement à cause de la « pureté » de son sang. Après sa mort, elle eut tôt fait de se trouver un mari … un agent de police espagnol.

 

En 1954, les Français ont torpillé le plan de Communauté européenne qu’ils avaient eux-mêmes conçus.

 

Jusqu’en 1968, la majorité des garçons étaient encore en vestes et portaient les cheveux courts, la prédominance des pulls, des barbes ou des moustaches, et des longues chevelures ne cessa ensuite de se renforcer. Le caftan de berger afghan, doublé de fourrure, était très apprécié, été comme hiver.

Traduit de l’anglais par Fanny Ladd et Patricia Duez (je remarque que les traducteurs se mettent souvent à deux pour un même livre, intéressant ! )

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Un livre que j’offrirai autour de moi, il avait été sélectionné par notre club de lecture mais je n’avais pas eu le temps de le lire. Récit détaillé du retour à la vie d’une condamnée à mort : on suit minute par minute le retour à la vie d’une servante chez des Lords, qui réchappe à la pendaison (fait réel !) Elle avait été condamnée pour un infanticide qu’elle n’a pas commis. Elle avait été, pour son malheur, séduite par le fils de la maison.

L’auteur fait revivre avec un grand talent l’Angleterre des années puritaines de Cromwell, c’est passionnant un peu éprouvant à lire car c’est tellement dur autant d’injustices et le talent de l’écrivain crée un suspens proche de l’insupportable, c’est vraiment très bien écrit.

Traduit de l’anglais (États Unis) par Jeannine Hérisson.
5
J’ai tout simplement adoré ce livre, pourtant je ne suis pas une passionnée de la nature, et l’auteur y raconte avec minutie ses observations sur les plantes, les insectes et les animaux. Elle raconte très bien et au-delà de on sent tout les efforts qu’elle a dû faire pour vivre seule. Je la comprends trop bien : il a fallu qu’elle prenne racine. Au milieu des observations animales on trouve des petites notes sur les humains et les humaines qui m’ont beaucoup touchée. En particulier sur la solitude des femmes « d’un certain âge ».

Citations

Pendant ces douze années, j’ai appris qu’un arbre a besoin d’espace pour pousser, que les coyotes chantent près du ruisseau en janvier, que je peux enfoncer un clou dans du chêne seulement quand le bois est vert, que les abeilles en savent plus long que moi sur la fabrication du miel, que l’amour peut devenir souffrance, et qu’il y a davantage de questions que de réponses.

On en parle

http://www.ratsdebiblio.net/hubbellsue.html
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Très bon roman, et là franchement le frontière entrelivre pour ado et adulte disparaît. J’ai beaucoup apprécié aussi le site consacré au livre http://letempsdesmiracles.bondoux.net C’est un véritable prolongement du livre. Beaucoup d’humour, d’amour de tragédies et de désespoirs dans la fuite de cette femme à travers le Caucase. L’enfant arrivera en France, elle non. Toute l’horreur de notre monde actuel est très bien racontée dans ce petit roman.Lorsque les deux enfants Prudence du Libérai et Koumaïl-Blaise du Caucase font un concours des horreurs qu’ils ont déjà vécus, on revoit sans peine toutes les images qui hantent nos mémoires d’aujourd’hui. Comme beaucoup de livres avec un itinéraire à parcourir l’intensité parfois décroit, mais il y a des moments inoubliables : l’immeuble, la décharge. La fin est terrible, on se demande comment va faire le héros pour continuer à vivre. C’est aussi un livre sur l’amour maternel.

Traduit de l’anglais ( de l’Inde) par Christiane Besse

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Très beau livre et il m’a obligée à lire lentement, cela signifie que le livre me passionne autant pour son histoire que son écriture. On y lit la difficulté de « sur »vivre au Bengladesh. Beaucoup de thèmes sont abordés avec une grande délicatesse, la protection de la nature, les rapports dans le couple et la violence des conflits dans cette région où les populations sont parfois à la limite de la survie. La description du raz de marée est absolument saisissante. Le mélange des mythes et des faits naturels est très intéressant. Pour une fois, dans un récit à propos de l’Inde les castes et les religions sont au second plan, et on y retrouve donc les valeurs d’humanité commune à toutes les civilisations.

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Le club de lecture auquel je participe, propose régulièrement des BD je les lis toujours mais en général je n’aime pas, celle-ci représente l’exception. Elle m’a beaucoup plu. J’apprécie à la fois l’histoire et le graphisme. Comme toujours pour les BD, j’ai dû passer du temps pour bien comprendre mais cette fois, j’ai enfin ressenti une osmose entre le dessin et l’histoire et j’ai pensé que la BD servait mieux ce récit que le romanesque. J’ai même proposé cette BD au coup de cœur du mois de février. Je trouve que certains visages sont très proches de nous, la ville du Mans est bien rendue et la multitude des personnages enrichit la trame de l’histoire sans la noyer sous les habituelles scènes érotiques ou d’horreur.

Seul petit bémol, la façon dont le dealer se tire d’affaire, mais on peut aussi penser justement que dans la vie il n’y a pas de Léonard pour sauver les gens qui se mettent dans de telles situations.

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Travail d’historien remarquable à propos de l’hôpital, c’est à dire le lieu où l’on enfermait les enfants abandonnés et les indigents sous Louis XIV et Louis XV. Les parisiens se sont révoltés parce qu’ils pensaient qu’on enlevait leurs enfants pour leur faire subir toute sorte de sévices , le travail minutieux de Marion Sigaut prouve que leurs craintes étaient fondées, et elle nous fait découvrir le traitement réservé aux enfants et aux femmes dans cet hôpital. La lecture des mauvais traitements imposés aux enfants est vraiment insoutenable, j’ai dû souvent arrêter la lecture.

Citations

Si on était « gâtée », c’est à dire syphilitique, le traitement à Bicêtre était obligatoire, et il était le seul moyen de n’en pas mourir rapidement… Le traitement durait six semaines et consistait en saignées, purges, bains prolongés (à quatre dans des baignoires trop petites), frictions à la pommade mercurielle pour faire perdre des litres de salive. Ce traitement de choc provoquait la perte des dents et soudait ls gencives qu’il fallait séparer au bistouri. La diète était sévère, les malades crevaient de faim…

Voici la conclusion

Pour lutter contre ces crimes, il aurait fallu des moyens que personne n’avait. Personne sauf le roi. Louis XIV y avait renoncé pour n’avoir pas à faire porter à ses enfants l’opprobre qui serait retombé sur leur mère. Quant à Louis XV, bâillonné, ligoté par son vice, il était le plus mal placé pour tenter quoi que ce soit contre les trafiquants d’enfants. Après sa mort, la chape de plomb s’abattit sur l’affaire et son successeur dut affronter d’autres problèmes. Et le silence retomba sur les sombres trafics de l’Hôpital général.