Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque.

1
J’ai deux motifs de satisfaction :

 

  • D’abord, à cause de la couverture, un lecteur choisira, peut-être ce livre en pensant lire une œuvre érotique… Et… Il tombera sur Bruno Kerjen et ses masturbations au téléphone !
  • Mais surtout, j’imagine l’horreur pour Nina Bouraoui , d’être restée le temps de l’écriture à peaufiner un être aussi nul et qui ne vit que pour la raideur de son sexe !

Je ne sais pas pourquoi mais cette idée me faisait du bien , tandis que je me morfondais à la lecture de son roman. Devient-on méchante quand un livre vous déplaît totalement ?

Voilà, j’ai tout dit ou presque, une écrivaine a créé un personnage degré zéro de l’humanité, et m’a horripilée pendant tout le temps de la lecture. En plus, ce livre fourmille de détails inexacts qui évidemment vont agacer les malouins (je m’en fiche, je suis dinardaise !). Nina Bouraoui est née à Rennes donc, elle connaît la région, et de toute façon elle peut regarder une carte ! Comment son personnage peut-il voir la Vilaine dans le train de Paris à Saint-Malo ? Pourquoi situer Rothéneuf à 10 kilomètres dans les terres ? Pourquoi garer une voiture porte Saint-Vincent, en pensant qu’elle est proche de la sortie de la gare ? …

Un livre de plus , qui veut décrire le cafard ambiant des hommes qui ratent leur vie ? Bien sûr, pour donner une couleur « sociétale » il y a Supelec, cette entreprise qui va délocaliser, mais son personnage, Bruno Kerjen, est si vide qu’il ne peut en rien, nous apprendre quoi que ce se soit sur les difficultés des gens qui subissent ces délocalisations. Sa seule action a été de se raser la tête ! D’ailleurs, ça suffit pour le faire virer …non, j’exagère ! Mais pas tant que ça.

En ces temps, où il pleut un jour sur deux , je ne recommande pas cette lecture.

Citations

Sa vie à Saint-Malo cadre d’une tristesse infinie

la vie n’était pas un cadeau mais pas toujours un fardeau pour certains, mais ceux-là, il ne les connaissait pas ; la vie manquait d’horizon, de promesse, elle était brutale comme toutes les pierres grises qui tenaient les maisons de la rue de son enfance que seuls les hortensias coloraient.

Photo pour vérification , c’est bien de ce Saint-Malo là dont il s’agit :

le manque d’horizon :

 

L’érotisme du personnage

Ses épaules avaient durci grâce aux exercices de Maurice tout comme sa queue qui se réveillait elle aussi:Marlène devait être dans le coin.

 On en parle

On en dit du bien dans la presse ; dans les blogs, je n’ai pas encore trouvé de billet concernant ce roman.

Voici pour moi le poème des poèmes … un des rares que je connaisse par cœur. Je l’ai choisi car je ne peux pas penser à la poésie sans penser à Apollinaire, ces vers me trottent dans la tête et « le pont Mirabeau » occupe une place à part, pour plusieurs raisons. En voici une : j’ai eu l’occasion , lors d’une exposition à la Bibliothèque Nationale, de voir les manuscrits des poèmes les plus connus.

Guillaume Apollinaire a écrit celui-ci d’une seule traite, il ne s’y trouvait qu’une seule rature. Pour moi, c’est magique d’imaginer qu’un homme puisse enchanter des générations d’amoureux de la langue poétique et qu’il l’a écrit d’un seul jet.

 Le pont Mirabeau

Sous le pont Mirabeau coule la Seine

Et nos amours
Faut-il qu’il m’en souvienne
La joie venait toujours après la peine.

Vienne la nuit sonne l’heure
Les jours s’en vont je demeure

Les mains dans les mains restons face à face
Tandis que sous
Le pont de nos bras passe
Des éternels regards l’onde si lasse

Vienne la nuit sonne l’heure
Les jours s’en vont je demeure

L’amour s’en va comme cette eau courante
L’amour s’en va
Comme la vie est lente
Et comme l’Espérance est violente

Vienne la nuit sonne l’heure
Les jours s’en vont je demeure

Passent les jours et passent les semaines
Ni temps passé
Ni les amours reviennent
Sous le pont Mirabeau coule la Seine

Vienne la nuit sonne l’heure
Les jours s’en vont je demeure

Guillaume Apollinaire (alcools)

Merci Asphodèle

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque

3
Quelle énergie dans ce livre, mais également quelle volonté de démontrer ! Démontrer que l’exploitation des mines s’est construite sur la destruction de la partie la plus vulnérable de la population. Les propos du livre sont très durs et sans nuance, on se demande pourquoi ces pauvres gens se laissaient, ainsi, conduire à une mort certaine sans mirador ni barbelés…. L’autre côté ce sont les familles possédantes uniquement centrées sur leurs propres intérêts. Uniquement ? Pas tout à fait, heureusement ,un personnage est intéressé au sort des mineurs. Hippolyte qui a étudié et qui essaie d’améliorer la condition ouvrière et il y réussit.

Bref on relit du Zola,sans le talent littéraire, je ne peux pas dire que cela m’a beaucoup convaincue. Pourtant, je parlais d’énergie, parce qu’une petite fille Sophie qui est l’écrivaine, si j’en crois ce que je lis, se trouve être, par le plus grand des hasards, issue d’une des familles possédantes des houillères, et d’une famille de mineurs. Lorsque cette enfant paraît dans le roman, les personnages se complexifient. Pour plusieurs raisons :

  • L’auteure a connu les gens dont elle parle et cela l’empêche sans doute de voir le monde en noir et blanc.
  • La condition des mineurs s’est améliorée et la fermeture des usines est vécue comme une catastrophe aussi bien pour les possédants que pour les anciens mineurs
  • Une partie de la famille des mineurs a réussi son ascension sociale alors que la riche famille des possédants s’enfonce dans la pauvreté que l’on cache sous des allures de grandeurs.

On sent alors que l’enfant à qui on raconte des carabistouilles sur ses origines n’aura qu’une envie : se sortir de son milieu. Ce sont les événements de 68 qui lui permettront de s’émanciper complètement et voilà la militante politique qui règle ses comptes avec ses origines si étouffantes. Je comprends bien la démarche de Sophie Chauveau, au centre de relations conflictuelles, elle a voulu dire qui elle était et c’est ce qui m’a fait lire ce roman jusqu’au bout. Mais j’ai beaucoup moins apprécié qu’elle veuille également décrire la France du Nord et des mines de 1900 à 1968 avec le regard de la militante politique qu’elle est devenue.

Je trouve que sa vision de la société est trop manichéenne et sans grand intérêt. On a lu ces récits tant de fois, aussi bien du côté des mineurs que des grandes familles bourgeoises.

 Citations

Voilà le genre de passage où je trouve que l’auteur exagère à plaisir ! la glace qui dure 6 mois

 Des corons, des crassiers, des curés, des patrons d’une férocité inimaginable et des terrils à perte de vue, partout des malheureux de tous âges, des hommes aux gueules noires, des mioches chétifs et blêmes, accablés d’otites ou gémissant à fendre l’âme, et des femmes qui les lavent sans trêve. Hommes et gosses, par ici elles lavent tout, jusqu’aux murs des maisons qui noircissent trop vite. Sans cesse occupées à laver les femmes ! Pas d’autre horizon que le lavoir où , la moitié de l’année il faut fendre la glace.

On en parle

Je n’ai pas encore trouvé de blogs qui en parlent.

Traduit de l’anglais par Robert Fouques Duparc
Lu dans le cadre du club de lecture de ma médiathèque : thème Afrique du Sud

3
Devrait-on relire les livres qui nous ont marqués à leur parution ? Je n’ai pas la réponse, mais j’ai du mal à cacher ma déception pour ce livre là. Il faut dire que son écriture correspondait à un moment précis de l’histoire de l’Afrique du Sud , au moment où une répression terrible s’abattait sur tous ceux et celles qui voulaient que le monde entier sache ce que le régime de l’apartheid cachait d’horreurs dans son implacable application.

André Brink a eu le mérite, grâce à ce livre , d’ouvrir notre conscience à l’inacceptable violence faite aux valeurs de l’humanité. Un homme honnête, Ben Du Toit, simplement honnête, veut montrer qu’on a tué d’abord le fils du jardinier de l’école puis, le jardinier lui-même seulement parce qu’ils étaient noirs. Je me souviens bien combien j’avais été angoissée par l’enquête du personnage principal Ben , au point d’avoir parfois du mal à tourner les pages. Le roman commence en effet par la fin , la mort de l’honnête et courageux Ben. On sait que tout finit mal, seul espoir : l’écrivain réussit à écrire ce roman , il en devient un personnage ; comme son livre est arrivé jusqu’à nous, on comprend qu’une partie de la vérité a été révélée au monde.

Je trouve que le roman a vieilli et il m’a fallu toute la force de mes souvenirs pour aller jusqu’au bout. Je ne veux pas m’étendre car ce serait comme abîmer une œuvre qu’on a adorée mais je laisse à deux autres blogueuses le soin d’exprimer deux opinions opposées.

Citations

Une citation qui sert trop souvent (elle est de Tolstoï)

Toutes les familles heureuses se ressemblent. Mais chaque famille malheureuse l’est à sa façon.

Face à la tyrannie, je suis d’accord avec cette phrase

Je veux dire que peu de gens semblent prêts à être simplement humains, à en prendre la responsabilité.

 La vie

Attendre, attendre. Comme si la vie était un avoir dans une banque, un dépôt qui vous serait restitué un jour, une fortune. Et puis vous ouvrez les yeux et vous découvrez que la vie ne vaut guère plus que la petite monnaie qui se trouve dans votre poche.

Le racisme

Ils ne savent pas ce qu’ils font. Même quand ils tuent nos enfants, ils ne savent pas ce qu’ils font.. Ils croient que ça n’a pas d’importance. Ils ne croient pas que nos enfants soient des êtres humains. Ils pensent que ça ne compte pas.

 On en parle

Missbouquin qui aime beaucoup et Mimipinson qui n’a pas apprécié.

Je ne sais pourquoi…

 Je ne sais pourquoi

Mon esprit amer
D’une aile inquiète et folle vole sur la mer.
Tout ce qui m’est cher,
D’une aile d’effroi
Mon amour le couve au ras des flots. Pourquoi, pourquoi ?

Mouette à l’essor mélancolique,
Elle suit la vague, ma pensée,
À tous les vents du ciel balancée,
Et biaisant quand la marée oblique,
Mouette à l’essor mélancolique.

Ivre de soleil
Et de liberté,
Un instinct la guide à travers cette immensité.
La brise d’été
Sur le flot vermeil
Doucement la porte en un tiède demi-sommeil.

Parfois si tristement elle crie
Qu’elle alarme au loin le pilote,
Puis au gré du vent se livre et flotte
Et plonge, et l’aile toute meurtrie
Revole, et puis si tristement crie !

Je ne sais pourquoi
Mon esprit amer
D’une aile inquiète et folle vole sur la mer.
Tout ce qui m’est cher,
D’une aile d’effroi
Mon amour le couve au ras des flots. Pourquoi, pourquoi ?

Paul Verlaine, Sagesse (1881)

 

Quand je suis triste cette mouette à l’essor mélancolique emporte avec elle mon cafard au-dessus des flots.

La poésie du jeudi l’idée en revient à Asphodèle

 Roman lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque

3
Roman historique qui remplit parfaitement son office : renseigner le lecteur le plus exactement possible sur un fait du passé, et maintenir son intérêt grâce à une intrigue romanesque. Je ne connaissais les Amish que grâce au film Witness et quelques reportages lus. Marie Kuhlmann, écrivaine spécialiste de l’histoire alsacienne, s’est documentée sur les anabaptistes, secte protestante à l’origine des Amish.

Originaires de Suisse, ils fuient les persécutions des luthériens. Ils s’établissent en Alsace et là certains d’entre eux, seront à la recherche d’une plus grande pureté. Ils deviendront les Amish du nom de Jacob Amann leur prédicateur. La partie romancée suit une famille particulière celle d’Elias et Frena Freiner. On est plongée dans les difficultés de ces gens soumis aux persécutions et aux rudesses de la vie rurale. S’ajoutent pour eux les rigueurs qu’ils s’imposent à eux mêmes, par exemple : qu’un de leurs enfants épouse une anabaptiste non Amish, ils se coupent définitivement de lui et ne le reverront jamais. Ce qui me passionnent sur ce sujet c’est de voir que toute religion entraîne l’intolérance. Les protestants persécutés en pays catholiques ont été d horribles persécuteurs dans les pays protestants.

Le roman se lit très facilement mais n’est pas d’un grand intérêt littéraire, ce n’est pas son but on passe un agréable moment de lecture et on apprend beaucoup de choses sur cette sombre période d’intolérance religieuse.

Citations

L’intolérance

Là-bas, comme il ne parvenait pas à ses fins, il excommunia les opposants, qui firent de même à son encontre. Ancien contre Ancien, puisqu’ils étaient les seuls à pouvoir excommunier, chacun étant certain que l’autre commettait une grave erreur.

 Dominique, merci.

5
Et, j’espère que mon billet va donner envie à d’autres blogueurs et blogueuses de lire cet essai. Ok ! il est un peu long mais passionnant presque de bout en bout. Le « presque » n’est pas une critique mais décrit la nature même de cet essai. Svetlana Alexievitch part à la recherche de témoignages de citoyens qui ont connu l’URSS et qui vivent maintenant en Russie.Il y a donc, des témoignages plus intéressants que d’autres. Elle sait écouter ses compatriotes et on sent qu’il faut parfois du temps à ces gens pour dévoiler ce qui les rend très malheureux.

L’auteur alterne les témoignages assez longs avec des « propos de cuisine », qui sont un peu les brèves de comptoir chez nous. On y lit l’opinion de « Monsieur et Madame tout le monde » et que, le saucisson a longtemps été l’unité de mesure de la richesse d’un pays ! Tous ou presque sont tristes et les seuls destins moins tragiques sont ceux qui vivent à l’étranger.

On ressort bouleversé par cette lecture, car on se sent aspiré peu peu par les différentes tragédies russes. J ai parfois été proche du malaise, car il ressort de ce livre que le pire ennemi de l’homme c’est l’homme s’il a le droit de tout faire subir à son semblable. Comme ce tortionnaire qui se vante d’avoir fait mourir des prisonniers en leur maintenant la tête dans les seaux d’excréments.

Il se pose alors régulièrement cette question : comment vivre sereinement en Russie, puisqu’aucun tortionnaire n’a été jugé. Les victimes et les bourreaux se partagent donc les lieux de rencontre. Je pense que cela ne doit pas être très facile à vivre. À travers tous ces témoignages un élément ressort régulièrement, du temps de la période soviétique, l’argent n’avait pas d’importance et c’est pour tous un choc énorme d’imaginer qu’aujourd’hui, on soit jugé sur ses capacités financières.

Il y avait peu de plaisirs durant les 70 années du soviétisme, en conséquence de cela (peut-être), les joies de l’esprit -en particulier celles des textes littéraires- s’imposaient. Les jeunes Russes d’aujourd’hui n’ont plus ce goût de lire. Être libres, voulaient dire pour les intellectuels soviétiques, pouvoir lire ce qu’on voulait ,sauf que maintenant ils sont libre et ils ne lisent plus !

Le plus déchirant , parce ce que plus contemporain : les victimes des purges staliniennes appartiennent au passé, c’est le sort des Russes dans les nouvelle Républiques. Les guerres contre les minorités sont horribles , tout est permis et, hélas ! Ça continue.

Un grand livre indispensable pour comprendre notre époque !

 Citations

Humour communiste

Un communiste, c’est quelqu’un qui a lu Marx, et un anti-communiste, c’est quelqu’un qui l’a compris.

L ‘argent

Avant, je méprisais l’argent parce que je ne savais pas ce que c’était. Dans notre famille, on n’avait pas le droit de parler d’argent. C’était honteux. Nous avons grandi dans un pays où on peut dire que l’argent n’existait pas. Je touchais mes cent vingt roubles, comme tout le monde, et cela me suffisait. L’argent est arrivé avec la perestroïka. Avec Gaïdar. Le vrai argent. Au lieu de « Notre avenir, c’est le communisme ! » il y avait partout des pancartes avec « Achetez…Achetez…..L’argent est devenu synonyme de liberté.

 Juger Staline ?

Pourquoi nous n’avons pas fait le procès de Staline ? Je vais vous le dire… Pour juger Staline, il faut juger les gens de sa propre famille , des gens que l’on connaît. Ceux qui nous sont le plus proches.

 Les gens simples

Ils n’étaient pas tous communistes, mais ils étaient tous pour un grand pays. Les changements, ça leur faisait peur , parce qu’après tous les changements, les gens simples finissent toujours par se faire avoir.

 Un pays conçu pour la guerre

Notre État a toujours fonctionné sous le régime de la mobilisation , dès les premiers jours. Il n’était pas conçu pour la paix.

Une formule à retenir

Le communisme, c’est comme la prohibition : l’idée est excellente mais ça ne marche pas.

 Une famille ordinaire

Moi, je fais partie des gens que monsieur l’oligarque envoie se faire foutre. Je viens d’une famille ordinaire : mon père est alcoolique, et m amère se crève la paillasse pour trois fois rien dans un jardin d’enfants. À leurs yeux nous sommes de la merde , du fumier… Un jour quelqu’un me mettra obligatoirement un fusil entre les mains . Et je le prendrai.

 L’exil

J’ai fichu le camp aux États-Unis. Je mange des fraises en hiver. Du saucisson, il y en a autant qu’on en veut ici.

 Les changements

Il y en a qui ont eu le gruyère et d’autres, les trous du gruyère.

Les héros soviétiques à la maison

Un héros ! Pendant longtemps, il s’est pavané avec son manteau militaire, il buvait, il faisait la bringue. C’était ma grand mère qui travaillait. Lui, il était un héros.

On en parle

Chez Dominique où je l’avais noté et « entre les lignes et entre les mots » blog que j’ai trouvé chez Babelio.

 Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque , thème : le voyage.

3
J’ai dans la ma liste, deux romans de cet auteur que vous avez été plusieurs a bien aimés : « la lune captive dans un oeil mort » et « la théorie du panda » chez Krol une fan inconditionelle de cet auteur. 
Ce roman est, je le pense parce que je n’ai pas lu les autres, un bon exemple de son écriture.

Il y a un charme à sa façon d’écrire, et ses personnages sont attachants malgré leur peu d’envie de vivre. Mais j’avoue que l’extrême pudeur du narrateur m’a quelque peu dérangée. Le narrateur mal dans sa vie, et en décalage avec le monde qui l’entoure, s’enfuit à travers la France avec sa fille Anne qu’il a fait sortir de l’hôpital psychiatrique. On ne saura pas pourquoi elle y était, une chose est sûre, il aurait mieux valu, pour les personnages transformés en cadavres, qu’elle y soit restée.

Rien n’étonne son père (moi si !) et comme il n’a plus goût à grand chose cette cavale lui semble mieux que la vie avec la gentille Chloé qui passe son temps à rénover des tables de nuit. Dit comme ça, on pourrait penser que je n’ai pas aimé ce roman, ce n’est pas tout à fait vrai , Pascal Garnier a un style et une façon de raconter qui retient le lecteur.

Je lirai ses autres livres pour me faire une idée définitive de cet écrivain. Pour l’instant je ne suis pas totalement conquise.
Je mets en lien son interview où il m’est apparu très sympathique.

Citations

J’aime bien cette phrase

Bien des fois, alors qu’il circulait au volant de sa voiture, il avait remarqué ces individus, généralement solitaires, penchés au-dessus des grands axes routiers comme des busards mélancoliques.

C’est exactement l’état d’esprit du personnage principal

La vie au paradis. C’était exactement l’idée que Marc s’en faisait, l’insignifiance poussée jusqu’à la perfection. 

On en parle

Biblio-lingus beaucoup plus enthousiaste que moi

et son interview sur encres vagabondes

 Traduit du russe par Sophie Benech.
Merci Dominique pour cette découverte.

5
C’est un petit bijou ! Comme Dominique, je regrette que l’auteur ne se soit pas davantage étendu sur l’histoire de Tatania Gnéditch. Cette femme a traduit de mémoire (848 pages en édition poche !) le Dom Juan de Byron. Son talent est tel, qu’elle a réussi à attendrir un des bourreaux de la Tchéka qui lui a fourni, papier crayon , et une édition de Byron pour qu’elle puisse finir son travail.

Ce récit trop bref, rend compte de la passion des russes intellectuels broyés par le régime soviétique, mais également fascinés par la littérature. Un petit bijou , et il faut parfois peu de mots pour être bouleversée ; l’image de Tatania dans sa minuscule cellule sans lumière de la Loubianka qui se fait rabrouer,et injurier par son gardien car elle se lève parfois, de sa table de travail au lieu de rester assise pour finir sa traduction, est définitivement fixée dans ma mémoire.

L absurdité du régime soviétique peut se lire dans les très longs livres de Soljenitsyne mais aussi dans les raisons qui ont valu à cette femme, en 1945, 10 ans de condamnation au goulag.

« A la demande d’un diplomate anglais, elle avait traduit en huitains anglais un poème de Véra Imber « le méridien Poulkovo », destiné à être publié à Londres. Après l’avoir lu, le diplomate lui avait dit : « Si vous travailliez pour nous , vous pourriez faire beaucoup pour les relations entre la Russie et l’Angleterre ! ».

Ces paroles l’avaient profondément marquée, l’idée de voyage en Grande Bretagne avait commencé à la hanter, et elle considérait cela comme une trahison. Elle avait donc retiré sa candidature au Parti. On comprend fort bien que les commissaires-interrogateurs n’aient pas ajouté foi à cette confession hallucinante, mais on n’avait pas réussi à trouver d’autres chefs d’accusation . Elle avait été jugée(cela se faisait à l’époque) et condamnée à dix ans de camp de redressement par le travail pour « trahison de la patrie », selon l’article 19, qui stipule que l’intention n’a pas été concrétisée. »

Elle reviendra du camp , sera professeur de traduction, et patagera son intimité avec des êtres incultes qu’elle a connus en camp , mais, peut-être qu’au delà de la littérature , ils l’ont aidée à survivre dans ce milieu où tant d’autres ont laissé leur vie.

« Son « mari de camp » , Grégori Pavlovitch (Égor), était alcoolique au dernier degré et jurait comme un charretier. Extérieurement, Tatania l’avait civilisé, elle lui avait appris, par exemple, à remplacer son juron préféré par le nom d’un dieu latin. À présent, il accueillait les élèves de sa femme en disant : « On boit un petit coup, les gars ? Et si, elle veut pas elle a qu’à aller se faire phébus ! »

Vraiment un tout petit livre pour une très grande émotion.

la-traversee-du-continent

Lu dans le cadre du club de lecture de la médiathèque, Thème littérature francophone canadienne.

5Et voilà 5 coquillages sans l’ombre d’une hésitation : quel plaisir de découvrir un petit bijou de lecture qu’on a immédiatement envie de partager avec tous ceux qu’on aime. Un club de lecture, ça sert à ça : PARTAGER des plaisirs. Une enfant de 11 ans vit depuis 5 ans avec ses grands parents aimants et ses deux petites soeurs, dans un tout petit village francophone, au milieu des champs de maïs ; elle doit traverser le continent Nord américain , pour retrouver sa mère .

Tout est parfait et sonne juste dans ce roman, d’abord la séparation avec les grands parents. L’auteur change de point de vue à chaque fois que Rhéauna (Nana) doit se confronter à la peine d’un membre de sa famille, on suit d’abord les difficultés de la petite fille, puis en quelques pages très sobres, on comprend pourquoi l’adulte en est arrivé à vivre une vie qui semble parfois totalement absurde. Comme le mari de Bébette monstre obèse qui dégoûte profondément la petite Rhéauna.

Le grand-père sait qu’après le départ de ses petites filles qu’il aime encore plus fort que sa propre fille, il n’y aura plus que la mort comme perspective. Sa souffrance m’a beaucoup touchée. La première halte de l’enfant, c’est chez la petite soeur de son grand-père. La mal aimée, l’acariâtre tante révèlera son douloureux et si beau secret à la petite fille émerveillée. Ensuite, elle retrouve Bebette et son fameux « saperlipopette », que de tristesse derrière cette personnalité exubérante !

Puis elle retrouve Ti-Lou , qui est devenue « guidoune » pour faire souffrir son tortionnaire de père. À travers ce voyage , l’enfant va peu à peu se détacher de la déchirure qu’a représentée la séparation de son lieu d’enfance protégé par ses grands-parents et en même temps, s’attacher et aller vers sa mère. Les trois rêves qu’elle fait dans le train sont de très beaux moments de littérature et permettent de comprendre le chemin inconscient de l’enfant qui part de la terreur pour aller vers l’indépendance et l’affection.

La chute, la fin, je ne peux pas la raconter sans déflorer le roman, mais c’est absolument génial. Le style fait beaucoup pour le plaisir de lecture, on ne comprend pas tous les mots mais on savoure une langue venue d’ailleurs, plus rocailleuse que le français mais qui va bien avec ce que décrit l’auteur.

PS je n’explique pas le mot « guidoune » à vous de trouver !

Citations

Les mots qu’on ne connaît pas mais qu’on comprend

Il l’embrasse à pleine bouche, cette fois en ratoureux qui n’a pas d’autre argument.

Les personnalité et les rôles dans les fratries

Elle continuait de faire rire tout le monde, comme toujours, tout en faisant preuve d’une assurance étonnante. Et se montrait tranchante quand elle trouvait bon de l’être, c’est-à-dire à peu près tout le temps.

C’est ainsi qu’elle s’était transformée sans trop s’en soucier en tortionnaire de cette petite sœur qu’elle considérait davantage, à l’instar des autres membres de la famille, comme la servante de la maisonnée que comme la fille cadette des Desrosiers, Bebette commandait, Régina obéissait. Ce n’était nulle part, c’était juste une chose qu’on acceptait sans discuter. Et qui avait durer des années.

J’ai enfin compris l’utilité des dimunitifs

Ils portent des noms impossibles, Althéode, Olivine, Euphrémise, Télesphore, Frida, Euclide, qu’ils font claquer à grands coups de tapes dans le dos ou entre deux embrassades.

 La société dans les années 1900

En grandissant , tu vas te rendre compte qu’on vit dans un monde fait par les hommes, pour les hommes….pis souvent contre les femmes…C’est comme ça depuis la nuit des temps, on peut rien y changer, pis celles qui essayent de changer quequ’chose font rire d’elles… Elles ont beau se promener dans les rues avec des banderoles pour exiger le droit de vote par exemple, tout le monde rit d’elles…même les autres femmes. Tu comprends, on a juste trois choix, nous autres : la vieille fille ou ben la religieuse -pour moi c’est la même chose- , la mère de famille, pis la guidoune.

 On en parle

Babelio en attendant de mettre des liens plus précis